dimanche 15 juin 2014

La Médecine Générale en finale ?

"Le temps passe. Devant nous, l'impasse. Avant le passage, sachons être sages. Je sais la faiblesse de mes mots qui blessent. Je m'en veux tant.
Le temps court sans aucun recours. Mes peurs m'encouragent à te mordre de rage, un dernier reproche et le mur se rapproche. Je m'en veux tant." (Six pieds sous terre, Mozart l'Opéra Rock)


Il y a quelques jours, @gendesalp publiait un billet ici en guise de bilan et de point final à son activité de médecin généraliste libéral.

Comme beaucoup d'autres, j'imagine, j'ai accueilli la nouvelle à la manière d'une gifle en pleine figure.
Tous ses arguments résonnent parfaitement chez beaucoup d'entre nous, médecins généralistes.
La course à une augmentation de notre rémunération pour faire face aux charges, la diminution de nos semaines de vacances pour tenter de compenser... la course sans fin, avec l'arrière pensée qu'il ne faut pas se plaindre, parce qu'à bien y regarder il y a des citoyens bien plus en difficulté que nous.

Une petite dose supplémentaire de "t'as signé, c'est pour en chier" qu'on entend souvent, entre deux "on vous a payé vos études" et "arrêtez de vous plaindre bande de nantis", et on en arrive au constat partagé : Quid de l'avenir de la médecine générale en France ?

J'avais déjà eu l'occasion d'en parler, voire de pousser des coups de gueule ici et ou encore .

Le temps passe. Peu de choses changent. Les découragements s'amoncèlent.

"Elle attend que le monde change, elle attend que changent les temps. Elle attend que ce monde étrange se perde et que tournent les vents. Inexorablement, elle attend" (Elle attend, Jean-Jacques Goldman)

Alors, une fois n'est pas coutume, je vais un peu sortir du monde des bisounours pour parler de nous. J'entends "nous" les médecins généralistes. Et notamment ceux des réseaux sociaux, très actifs.

Il plane en ce moment une sorte d'indignation mêlée à une résignation viscérale.
Le choses vont mal. Nous allons droit dans le mur.
Nous nous lamentons, nous nous offusquons, nous sommes parfois révoltés.
Et après ?
Une fois ces sentiments de colère et de rage passés, que faisons-nous ?
Nous retournons sagement à nos occupations.
Oh, parfois, nous râlons un peu plus fort, si fort que d'autres que nous (les généralistes) l'entendent, et s'indignent de concert.

Mais nous restons là. A attendre que le monde change. Qu'il change comme nous le voulons, mais qu'il change sans que nous intervenions. Parce que, bon, faut pas pousser, on a des milliards de choses à faire, et beaucoup trop pour s'investir et influencer les choix et les décisions de ceux qui sont aux responsabilités.


"Trois tours d'périph, fenêtre ouverte, j'vois passer c'qu'on aurait pu être. Oui, je t'en veux, mais moins qu'à moi" (Tout s'efface, Patrick Bruel)

Je m'en veux. Je n'en fais sans doute pas assez.
Nous, médecins généralistes, pourrions connaître un avenir tellement plus encourageant que celui qui nous est promis. Nous pourrions faire tellement, en collaboration avec nos confrères des autres spécialités. Mais nous restons là, contemplatifs. Nous laissons les autres faire. En râlant. Mais sans bouger. Ou si peu.

En ces moments de coupe du monde de football, nous râlons sur les joueurs et l'arbitre devant notre écran, sans vouloir chausser les crampons et aller sur le terrain. C'est plus facile. On peut ensuite avoir le beau rôle, à coups de "je vous l'avais bien dit" ou de "je savais parfaitement ce qu'il fallait faire, c'était évident, et facile".

"On dit dans la rue que pour toi y a plus d'issue, que pour sauver ton honneur, il faut quitter cette fleur" (On dit dans la rue, Roméo et Juliette)

La situation est perdue d'avance ?
Il n'y a plus rien à faire ?
Nous allons tous, un jour ou l'autre dévisser notre plaque, nous les médecins généralistes ?
Et si on réveillait enfin un peu ?
Et si nous pesions un peu plus lourd dans les négociations, les décisions ?
Nous sommes soi-disant le pivot du système de soins... Je nous vois bien faire le culboto : nous bougeons beaucoup, mais nous restons sur-place.

J'entends déjà venir les critiques, je suis un syndicaliste... bla bla bla... mais toi t'as le temps... bla bla bla...

"Je prie les hommes, je prie les rois, d'être plus homme, d'être moins roi. Je prie les yeux, les yeux défaits ce que les cieux, ne voient jamais. Je prie l'amour, et nos cerveaux, qu'on imagine et qu'on se bouge et sans trop compter sur là-haut" (Prière païenne, Céline Dion)

Voilà.
Je prie. Pour que nous nous réveillons un peu.
Nous pouvons faire des actions collectives. Je ne parle pas de grève ou de choses de ce genre. Les syndicalistes pur souche auront tout le loisir de la décréter s'ils la souhaitent.
Non, je parle d'être force de proposition.
D'être un lobby. Pas dans le mauvais sens du terme. Pas pour défendre de petits intérêts particuliers.
Mais pour peser sur les négociations.
Parce qu'au final, ce sont nos patients, à tous, qui vont souffrir si nous partons.
Alors quel camp choisissez vous : celui des commentateurs sportifs, ou celui des joueurs ?
En sport, que l'on gagne ou qu'on perde un titre, on peut se targuer de l'avoir défendu.

Qu'allons-nous choisir de faire pour l'avenir de notre profession ?
Je serai sur le terrain. J'y suis déjà.
Mais nous ne sommes pas assez nombreux pour ce sport collectif.
J'entends déjà les commentateurs nous dire que nous aurions dû faire autrement.
J'ai du mal à voir l'arbitre. Il nous reste encore combien de temps avant le coup de sifflet final ?

1 commentaire:

  1. D'être force de proposition comme les médecins blogueurs reçus par Marisol Touraine il y a maintenant prêt de 2 ans ?
    Quand est-il ressorti ?

    Je suis d'accord qu'il faut tâcher d'être positif .
    Cependant, force est de constater que les choses ne vont pas vraiment dans le bon sens .
    Où est le Sunshine act à la française par exemple ?

    Amicalement

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