dimanche 17 septembre 2017

(In)déterminé

"Fatalité
Maîtresse de nos destins
Fatalité
Quand tu croises nos chemins
Fatalité
Qu'on soit prince ou moins que rien
Fatalité
Qu'on soit reine ou bien putain
Fatalité
Tu tiens nos vies dans ta main" (Fatalité, Comédie musicale Notre Dame de Paris)


Sommes-nous vraiment maîtres de nos vies ou suivons-nous un plan établi à l'avance ? J'avais déjà écrit après un cours que j'avais eu, au sujet de la science et son avancée qui nous permettrait un jour peut-être de prédire le monde qui nous entoure.
Savoir prédire le mouvement des électrons, des atomes, des molécules, leur interaction avec le monde environnant... beaucoup de mathématiques, de physique et de chimie pour nous permettre de mieux comprendre les choses.

Mais nous sommes nous aussi faits d'électrons, d'atomes et de molécules. Comprendre le fonctionnement de tout cela et leurs interactions permettrait-il de comprendre et prédire le fonctionnement de chaque être humain ?
Un peu comme une sorte de Minority Report où des êtres humains doués de précognition peuvent prédire et éviter les crimes. Sauf que là, la science sera source de précognition.

Oui mais si on peut prédire, c'est pour pouvoir empêcher certaines choses d'arriver, ou limiter certains effets nocifs. Mais l'être humain qui va tenter d'influer sur le cours du temps... il est fait aussi d'électrons, d'atomes et de molécules, non ? Donc son intervention pour modifier le cours des choses... elle est déjà écrite aussi, non ?

« Mais y a toujours la lune qui s'méfie du soleil, et quand tout ça changera, c'est pas demain la veille. Certains smatchent ou labourent, d'autres soignent ou bien peignent, c'est à toi, c'est ton tour, qu'est-ce que t'as dans les veines ? A quoi tu sers, pourquoi t'es fait ? Terminus : Terre, un seul ticket » (A quoi tu sers ?, Jean-Jacques Goldman)

Du coup, finalement, toutes ces fois où nous vivons une scène avec l'impression bizarre de l'avoir déjà vécue, la sensation de "déjà vu", cela ne serait qu'une espèce de diffusion d'un épisode de la série dont nous sommes le héros et dont nous portions déjà en nous la bande annonce ?

De même, les "cons", vous savez, ceux qui vous aboient dessus que vous parliez météo, politique ou loisirs, ceux qui savent tout sur tout, tout le temps, sur tous les sujets (comme la #TeamAirMédecine par exemple), en fait, ils exécutent juste le programme porté par leurs électrons, leurs atomes et leurs molécules... C'est presque comme si ce n'était pas de leur faute...

Les grands désastres de l'histoire sont donc juste le déroulement du scénario porté en nous toutes et tous. Quoi que l'on fasse, quoi que l'on dise, c'était prévu.
Mon code génétique et les électrons, les atomes et les molécules qui me composent avaient prévu que j'écrirais ces lignes à 12h50 après les avoir ruminées pendant des semaines... 
Si vous lisez ces lignes, c'était prévu aussi ? Le mal de crâne que vous aurez peut-être à la fin de ce billet ? Le fait de ne pas le lire en entier ?

Notre autonomie existe-t-elle finalement ?

"Life can get you down so I just numb the way it feels. I drown it with a drink and out-of-date prescription pills. All the ones who loved me, they just left me on the shelf. Farewell. So before I save someone else, I've got to save myself. And before I blame someone else, I've got to save myself"
(La vie peut vous déprimer alors je paralyse l'effet que cela fait. Je noie cela avec un verre et un médicament périmé. Et tous ceux qui m'aiment m'ont juste laissé sur l'étagère. Pas d'adieu. Alors avant de sauver quelqu'un d'autre, il faut que je me sauve moi. Et avant de blâmer quelqu'un d'autre, il faut que je me sauve moi. Et avant d'aimer quelqu'un d'autre, il faut que je m'aime moi" (Save myself, Ed Sheeran)

Jury de thèse il y a trois jours. Sur la prise en charge du syndrome dépressif en médecine générale. Le président du jury, un médecin psychiatre que j'apprécie beaucoup, a parlé de la dépression en distinguant bien la tristesse de la dépression. Que certains avaient beau tout avoir pour eux, ils pouvaient souffrir d'un syndrome dépressif. C'est écrit, c'est "endogène" c'est à dire, porté en nous par notre code génétique.
Comme d'autres maladies.
Comme certains traits de caractère "je ressemble à ma mère/mon père sur ce point" peuvent donc s'expliquer par "tu as le code génétique qui fait que tes électrons, tes atomes et tes molécules vont interagir de telle façon que tu auras telle ou telle réaction le moment venu".

Tout est donc figé.

La beauté de l'être humain serait alors de savoir se mentir en se disant que nous sommes maîtres de tout et que nous avons notre libre arbitre ?
Partir en guerre contre la nature serait donc peine perdue ?
Est-ce que c'est ce que comprennent les patients âgés que je soigne et qui ont souvent l'air apaisés malgré des vies pas forcément faciles ? Cette espèce d'acceptation est-elle écrite aussi dans le patrimoine génétique de ces patients ?

Et le fait de se poser toutes ces questions-là, c'est génétique et dû à la quarantaine ou ce sont mes électrons, mes atomes et mes molécules qui prennent un malin plaisir à interagir et amener ce résultat ?


Si j’avais pu choisir, j’aurais bien aimé les interactions qui permettent de dormir tard le week-end et évitent de prendre du poids facilement. Faut croire que c’est écrit aussi ?