"Il existe un monde virtuel et différent, où chaque seconde fait de nous des combattants. Notre seul espoir est de tout reprogrammer. On ira, on saura sauver notre existence, se donner une chance de tout effacer. On ira, on saura sauver notre existence pour refaire un monde sans danger [...] On vous promet de donner le maximum, contre la menace et de sauver tous les hommes" (Un monde sans danger, Générique TV de "Code Lyoko")
Ok, ok..
Je veux commencer un billet des plus sérieux et je cite en tout premier le générique d'un dessin animé que mes zèbres adorent...
Mais à bien y regarder je me dis que les paroles collent parfaitement au sujet que je veux aborder...
Une idée ?...
La future Loi de Santé, qui devrait être débattue en 2015 à l'assemblée.
Le monde virtuel et différent serait pour moi le monde un peu feutré (en tout cas tel que je le perçois) des cabinets ministériels. Je me demande lequel d'entre eux a déjà mis les pieds dans un cabinet de médecine générale toute une journée...
Lors de la présentation de la Stratégie Nationale de Santé, qui faisait office de travail préparatoire à la future loi, j'étais plein d'espoir. Je me disais qu'enfin, les choses bougeaient.
Notre ministre donnait le sentiment de vouloir sortir de l'hospitalocentrisme, sans pour autant faire de l'hospitalobashing.
Juste faire une juste place à la médecine ambulatoire à côté, et non à la place, de la médecine hospitalière.
Et la traduction dans le projet de loi de santé ? Exit tout ce qui donnait espoir, ou presque.
Toute l'attention a été focalisée sur le Tiers Payant Généralisé (TPG) parce que c'est vendeur, que les médias aiment bien, et que ça fait un peu le remake de Germinal de Zola... Les nantis versus le petit peuple.
Alors parlons tout de suite du TPG. Ce sera fait et on pourra (enfin) discuter du reste.
Je l'ai d'ailleurs promis à un ami qui s'étonnait que je sois "contre" cela.
Je ne suis pas contre.
Pas du tout, même.
Je pratique DEJA le tiers payant. D'accord, sur la part obligatoire, ce qui fait que les patients qui n'ont ni CMU, ni Affection Longue Durée (ALD) prise en charge à 100%, je leur demande de régler 6,90€.
C'est cette somme que leur mutuelle leur remboursera, s'ils ont une mutuelle.
Parfois, des patients en grande difficulté me demandent s'ils peuvent me régler avec un différé, me demandent d'encaisser un chèque un peu plus tard ou même, promettent de venir me régler dans quelques jours ces 6,90€ et ne viennent pas.
Heureusement qu'ils ne le font pas tous, sinon, je mettrais la clef sous la porte...
Alors, de fait, si on me propose une solution de TPG, qui permettra aux patients défavorisés (trop pour me payer ces 6,90€ mais pas assez pour bénéficier de la CMU) je suis d'accord.
Mais là où je commence à coincer un peu, c'est quand je me demande comment je vais récupérer ces fameux 6,90€ ... enfin ces x fois ce montant, pour chaque patient.
Car il existe plusieurs centaines de mutuelles en France. Si je dois me fendre d'un courrier pour chacune des mutuelles pour réclamer ce montant là... Multiplié par le nombre de patient....
"Maman dit que lorsqu'on cherche bien, on finit toujours par trouver. Elle dit qu'il n'est jamais très loin, qu'il part très souvent travailler. Maman dit travailler c'est bien, bien mieux qu'être mal accompagné, pas vrai ? Où est ton papa? Dis-moi où est ton papa !" (Papaoutai, Stromae)
"Oh mais ça ne prend que cinq minutes, enfin ! Et les pharmaciens le font déjà !"
Oui, 5 minutes par patient. J'en vois en moyenne au moins 20 par jour.
Je rajoute donc 1h40 de travail par jour.
Travailler plus pour gagner... ? Rien en plus... et passer moins de temps en famille...
Citez-moi une seule profession qui accepterait de passer près de deux heures de plus de travail par jour pour ne rien toucher de plus.
A ma connaissance, en France, il n'y en a pas...
On va vachement donner envie aux jeunes de venir s'installer en médecine générale avec ça, c'est sûr...
Et c'est là que le politique est habile. Si nous, médecins, refusons le TPG, nous sommes ces riches nantis qui ne veulent pas aider la population.
Si nous acceptons le TPG, il n'existe AUCUNE garantie à l'heure actuelle qu'il soit simple à réaliser et ne nous demande aucun travail supplémentaire.
Parce que, concrètement, si le TPG fonctionnait efficacement, nous devrions passer la carte vitale du patient dans notre lecteur, la CPAM nous rembourserait les 23€ et basta...
Ensuite, comment la CPAM se débrouille pour se faire rembourser par les mutuelles, ce n'est plus mon problème.
Dans ces conditions là, je suis pour le TPG.
Alors j'entends bien les sirènes du "c'est une médecine étatisée" "nous deviendrions à la tutelle de l'Etat pour notre rémunération"...
J'avoue que ça, je n'en ai pas particulièrement peur.
On peut même me proposer le salariat, je suis preneur. Mais je doute que cette solution soit celle choisie en hauts lieux.
Et les pharmaciens ?
Oui, en effet, ils font ça depuis des années. Ils ont bien souvent un mi-temps, voire plus, pour s'occuper de cela.
Leur modèle économique est bâti en tenant compte de cette contrainte.
Alors, oui, nous, médecins, nous pourrions embaucher pour faire ce travail. Pas de souci.
Mais, concrètement...
Vous accepteriez, vous, pour votre métier, qu'on vous donne 1h40 de travail en plus obligatoire par jour pour maintenir votre salaire, travail que vous pouvez faire faire par quelqu'un que vous aurez à payer, sans compensation de revenus ?
Voilà. Tu vois Gabriel, je ne suis pas contre ce TPG. Mais pas n'importe comment.
Mais toute cette discussion, sans même avoir une seule fois abordé notre niveau de rémunération. Nous sommes les médecins les moins bien payés d'Europe à quelques exceptions près. Nous sommes la spécialité la moins bien payée de France.
Alors oui, les pouvoirs publics (et un peu les médias, il faut le reconnaître) surfent sur cette vague germinalienne des nantis qui demandent encore plus d'argent.
Il ne s'agit ni plus, ni moins, que de demander à être payé "normalement". Qui accepterait sans sourciller en France, d'être payé parfois 2 fois moins cher que nos voisins européens, pour le même travail ?
Jusqu'à présent, les médecins généralistes râlaient un peu, mais n'allaient pas beaucoup plus loin. Nous gagnons bien notre vie, bien sûr. Au prix d'horaires de travail un peu fous bien souvent. Mais tout est fait pour nous faire culpabiliser d'oser réclamer un peu de "justice" dans notre rémunération (oui, "Justice" est le mot à la mode partout en ce moment. Comme "Pacte" ou "Citoyen". On en met à toutes les sauces, mais on ne sait plus trop ce que ça veut dire en réalité).
"Notre seul espoir, est de tout reprogrammer..."
Quand je vous disais que cette chanson pouvait s'appliquer à cela...
Notre espoir : réécrire une partie de ce projet de loi
"On vous promet de donner le maximum, contre la menace et de sauver tous les hommes"
J'ai l'impression que dans nos rangs, les choses bougent.
La goutte d'eau qui fait déborder un vase déjà trop rempli.
On parle de faire pratiquer les vaccins par nos collègues pharmaciens.
Soyons clairs : Vacciner, c'est un jeu d'enfants : désinfecter la peau, prendre la seringue, la planter dans l'épaule, injecter, retirer la seringue.
Voilà.
Pas sûr même qu'il faille être pharmacien pour cela.
Michèle Delaunay m'avait invectivé sur Twitter en m'expliquant cela.
J'aime quand les gens qui n'y connaissent rien me prennent pour un ignorant.
Parce que si pratiquer le vaccin est enfantin, décider de vacciner, choisir quel vaccin, sur des arguments purement scientifiques et non marketings, là, ça demande réflexion.
Et je pense que les collègues pharmaciens sont déjà un peu trop occupés pour devoir en plus s'en charger.
Sans compter que, dans la majeure partie des cas, les vaccins, nous les faisons au cours d'une consultation pour un autre motif... (Traduisez par : "Tu la vois venir mon augmentation inutile des dépenses de santé ?")
Donc, ne pas s'y tromper : si la grogne monte, c'est SURTOUT pour le bien de nos patients !
"Souviens-toi, était-ce mai, novembre, ici ou là, était-ce un lundi ? Je ne me souviens que d'un mur immense, mais nous étions ensemble, ensemble nous l'avons franchi" (Ensemble, Jean-Jacques Goldman)
La Stratégie Nationale de Santé avait fait la part belle à l'enseignement de la médecine générale. Les moyens allaient être mis noir sur blanc dans la loi.
Enfin !
Dans le projet de loi... Juste une ligne... pour dire que tout cela sera discuté avec le Ministère de l'Enseignement Supérieur. (Traduisez par : "Tu la vois venir l'absence de mesure concrète dans ma future loi ?")
Pourtant, enseigner la médecine générale, c'est donner envie aux jeunes médecins de s'installer. C'est prouvé.
"Read my lips and they will tell you : Enough is enough is enough is enough" (Read my lips, Jimmy Sommerville)
(Lis sur mes lèvres et elles te diront : trop c'est trop)
Mais, pour la première fois de ma vie (si on exclut une grève de garde quand j'étais externe pour obtenir le repos de sécurité) je vais faire grève.
Je n'aime pas ça.
Je veux dire, je n'aime pas laisser mes patients sans solution de soins. Quand je ne suis pas là, j'ai un remplaçant, ou mon interne en SASPAS quand je donne cours à la fac.
Mais là...
Le mur à franchir est immense.
Allons-nous le franchir ?
Comme je le disais dans l'un de mes tous premiers billets "Le jour où les généralistes s'éveilleront..."
samedi 6 décembre 2014
samedi 1 novembre 2014
Tu le mérites ?
"I bought you drinks, I brought you flowers. I read your books
and talked for hours. Every day so many drinks, such pretty flowers,
so tell me : what have I, what have I, what have I done to deserve this ?"
(What have I done to deserve this, Pet shop boys)
(Je t'ai payé
des verres, acheté des fleurs. J'ai lu tes livres et parlé des heures. Tous les
jours, tant de verres et de si jolies fleurs, alors dis-moi : qu'ai-je fait
pour mériter cela ?)
"Il a
travaillé toute sa vie docteur. Et il est mort comme ça, d'un coup. Il était en
pleine forme et c'est arrivé d'un coup. Il ne méritait pas cela"
Qui le
mériterait ?
Personne, bien
entendu. Personne ne mérite, au sens péjoratif de "tu n'as que ce que tu
mérites", de mourir. Encore moins quand le décès est brutal.
Tout comme quand
on pose un diagnostic grave chez un patient jeune. On lui fait entrevoir d'un
coup, plus ou moins violemment, qu'il n'est pas immortel. Qu'il va devoir se
battre de toutes ses forces.
Et s'il gagne ce
combat, il aura mérité sa survie ?
Parce que ceux
qui le perdent ne le méritaient pas ?
Je n'aime pas
cette notion de mérite face à la mort. Elle introduit forcément une notion de
valeur alors que la vie est comme ça. C'est un apprentissage permanent.
Nous faisons des
choix, certains sont de nature a améliorer notre vie présente ou future.
D'autres peuvent entraîner tout l'inverse.
Pas de fatalité.
Juste un choix.
Le patient qui
choisit de fumer, c'est son choix. Sera-t-il forcément atteint d'un cancer
pulmonaire ensuite ? Je n'en sais rien. L'aura-t-il mérité ? Je ne le crois
pas.
Oui, il aura eu
des conduites qui l'auront amené à prendre un risque important. Oui, nous
sommes là, les soignants, pour aider et accompagner ceux qui font le choix
d'arrêter de prendre ce risque. Ce n'est parfois pas facile, mais ces patients-là ont le mérite d'essayer... et d'y arriver.
Ils ont du
mérite ? Mais s'ils développent un cancer du poumon "quand même", ils
auront du mérite, sans mériter cette maladie, ou en la méritant un peu quand
même ?
"You live, you learn. You love, you
learn. You cry, you learn. You lose, you learn. You bleed, you
learn. You scream, you learn" (You learn, Alanis Morissette)
(En vivant, tu
apprends. En aimant, tu apprends. En pleurant, tu apprends. En perdant, tu
apprends. En saignant, tu apprends. En criant, tu apprends)
Donc, nous
vivons. Nous apprenons à vivre, et l'ardeur que nous mettons dans cet
apprentissage nous fait mériter ce que nous obtenons de notre vivant ?
"De toute
manière, toi, t'es médecin, t'es blindé de fric"
Le fameux
#LesMédecinsCesNantis de Twitter.
Les médecins
généralistes (dont je fais partie), ne sont pas à plaindre dans l'échelle des
revenus de la société. Bien entendu, si vous comparez le revenu moyen d'un
généraliste à celui d'un individu gagnant le SMIC, il n'y a pas l'ombre d'un
doute possible.
Du coup,
parfois, et je suis persuadé que ce point précis est typiquement français, j'en
arriverais presque à éprouver une forme de culpabilité, ou de gêne vis-à-vis de
mon niveau de vie.
Dans ces
moments-là, exit les neuf années d'études, exit le fait d'avoir été boursier
(donc de ne pas avoir eu assez de revenus pendant mes études pour que l'Etat
décide de m'en donner un peu), exit les gardes de nuit, les petits boulots en
plus des études pour arrondir les fins de mois...
Dans ces
moments-là, j'oublie que si j'en suis là, c'est que je le mérite peut-être un
peu. Que "toute peine mérite salaire".
Et quand j'en ai
un peu assez qu'on puisse me le reprocher, plus ou moins gentiment, plus ou
moins sur le ton de la plaisanterie, je m'amuse à répondre, plus ou moins
gentiment, plus ou moins sur le ton de la plaisanterie aussi : "Le
concours de première année est ouvert à tous, sans limite d'âge. Tu veux que je
te prenne un dossier d'inscription ?"
Travailler pour
mériter ce que l'on obtient, c'est gratifiant. La fierté de ce dire que tout
cela, on ne le doit qu'à soi-même. Etre le propre produit de son mérite.
Mais alors, ceux
qui ne vivent pas la même réussite, c'est qu'ils n'ont pas fait ce qu'il
fallait pour la mériter ?
Et ceux qui
travaillent dur, mais ne connaissent pas le succès, ont-ils des raisons de
démériter ?
J'ai repris des
études cette année pour "mériter" dans quelques années un poste
universitaire. Je me replonge dans les cours, dans les statistiques, je révise,
je fais des exercices. Nous avons eu cette semaine un contrôle continu, certes
plus difficile que les années précédentes, et que je n'ai pas vraiment réussi.
Donc, si je ne
l'ai pas réussi, c'est que je ne méritais pas de réussir ? Donc travailler,
parfois beaucoup, parfois intensément, ne suffit pas au mérite ?
Alors, qu'est-ce
qu'on mérite, vraiment ?
"Un début
de janvier, si j'ai bien su compter. Reste de fête ou bien vœux très
appuyés. De Ruth ou de Moïshé, lequel a eu l'idée ? Qu'importe si
j'ai gagné la course, et parmi des milliers. Nous avons tous été
vainqueurs même le dernier des derniers, une fois au moins les meilleurs, nous
qui sommes nés" (Bonne idée, Jean-Jacques Goldman)
Des milliers ?
Des millions, non ?
Cette moitié de
nous est bien arrivée première aux portes de l'ovule, non ?
S'il y a un truc
sur Terre, que nous méritons tous alors, c'est d'avoir gagné cette fameuse
course, et d'avoir voulu, déjà à l'échelle microscopique, se battre pour
mériter notre venue, malgré tout ce qui rend celle-ci parfois si difficile,
voire impossible.
Mais ceux qui
n'arrivent pas à être parents, l'ont-ils mérité ?
J'ai finalement
beaucoup de mal avec le "mérite-sanction" divine. J'aime mieux le
concept de "mérite-accomplissement de soi".
Demain, les
zèbres vont rentrer de leur semaine de vacances chez les grands-parents, au
grand air jurassien. Ils se sont bien amusés visiblement.
Ils ont
d'excellents résultats scolaires, mais travaillent beaucoup pour les obtenir.
Quand ils
arriveront demain, une surprise les attendra...
Ils le méritent.
dimanche 14 septembre 2014
Juste après
"Elle a éteint la lumière, et puis qu'est-ce qu'elle a bien pu faire, juste après ? Se balader, prendre l'air, oublier le sang, l'éther, c'était la nuit ou le jour ? Juste après ?" (Juste après, Jean-Jacques Goldman)
Une annonce de diagnostic (sans vouloir relancer la discussion du billet précédent), une annonce de mauvaise nouvelle...
Finalement cela revient au même coup de semonce pour le patient : "Je vous annonce que votre état de santé actuel va changer entièrement votre avenir".
On discute un peu encore, on répond à toutes les questions qui peuvent venir à l'esprit du patient, on "laisse la porte ouverte" c'est-à-dire qu'on peut fixer un autre rendez-vous pour celles qui viendront forcément ensuite, une fois la nouvelle digérée.
Et le patient s'en va.
Mais après, il se passe quoi ? Il se passe quoi et avec qui ? Le patient est seul ? Il s'entoure de sa famille, de ses amis, de ses proches pour digérer un peu mieux la mauvaise nouvelle ?
"This used to be my playground, this used to be my childhood dream. This used to be the place I rant to whenever I was in need of a friend. Why did it have to end" (This used to be my playground, Madonna)
(C'était mon aire de jeux, c'était mon rêve d'enfance. C'était l'endroit où je courais quand j'avais besoin d'un ami. Pourquoi cela a-t-il dû s'arrêter ?)
Il se raccroche à quoi le patient quand on lui annonce une pathologie chronique, ou pire encore ?
Je veux dire, cet évènement, ces paroles que l'on prononce un jour, en consultation, alors qu'il vient nous voir, nous, représentant de la science, garant du "savoir" ?
On apprend des mots, des façons de dire ces choses là pendant nos études. Quand on a un peu de chance et qu'on nous dispense ce cours là.
Et sinon ? On leur balance l'info et notre boulot s'arrête là, peu importe la suite ?
Mais, du coup, quand il s'agit de pathologies moins graves, anodines, banales... mais que les mots que nous employons sonnent "médicament" "soins" ... là où seul le temps est nécessaire : comment faire pour ne pas céder à la facilité de dire "prenez tant de gélule X et tant de Y, puis faites 3 prises de sang" parce que ça nous donne l'impression d'être scientifique, là où le scientifique justement devrait dire "Vous pouvez être rassuré, rien qui ne nécessite que vous vous inquiétiez, laissez faire le temps, vous verrez ça passera" ?
Quand on fait basculer le patient dans la surmédicalisation, volontairement ou non, par habitude ou non remise en question, que fait-il après ?
S'imagine-t-il atteint d'une pathologie si grave qu'il a dû prendre tous ces médicaments prescrits ?
Pense-t-il que désormais, tous ses maux devront se guérir à coups d'ordonnances sans fin ?
Quand les mots sortent de notre bouche de soignant, il se passe quoi, juste après ?
"Les frissons où l'amour et l'automne s'emmêlent, le noir où s'engloutissent notre foi, nos lois. Cette inquiétude sourde qui coule dans nos veines, qui nous saisit même après les plus grandes joies." (Veiller tard, Jean-Jacques Goldman)
Puis, le soir, quand nous quittons notre cabinet, il se passe quoi ? Il se passe quoi et avec qui ? Nous emportons un peu de la souffrance de l'autre, sans la vivre réellement. Sans la vivre physiquement.
Sans la vivre, vraiment ?
Une annonce de diagnostic (sans vouloir relancer la discussion du billet précédent), une annonce de mauvaise nouvelle...
Finalement cela revient au même coup de semonce pour le patient : "Je vous annonce que votre état de santé actuel va changer entièrement votre avenir".
On discute un peu encore, on répond à toutes les questions qui peuvent venir à l'esprit du patient, on "laisse la porte ouverte" c'est-à-dire qu'on peut fixer un autre rendez-vous pour celles qui viendront forcément ensuite, une fois la nouvelle digérée.
Et le patient s'en va.
Mais après, il se passe quoi ? Il se passe quoi et avec qui ? Le patient est seul ? Il s'entoure de sa famille, de ses amis, de ses proches pour digérer un peu mieux la mauvaise nouvelle ?
"This used to be my playground, this used to be my childhood dream. This used to be the place I rant to whenever I was in need of a friend. Why did it have to end" (This used to be my playground, Madonna)
(C'était mon aire de jeux, c'était mon rêve d'enfance. C'était l'endroit où je courais quand j'avais besoin d'un ami. Pourquoi cela a-t-il dû s'arrêter ?)
Il se raccroche à quoi le patient quand on lui annonce une pathologie chronique, ou pire encore ?
Je veux dire, cet évènement, ces paroles que l'on prononce un jour, en consultation, alors qu'il vient nous voir, nous, représentant de la science, garant du "savoir" ?
On apprend des mots, des façons de dire ces choses là pendant nos études. Quand on a un peu de chance et qu'on nous dispense ce cours là.
Et sinon ? On leur balance l'info et notre boulot s'arrête là, peu importe la suite ?
Mais, du coup, quand il s'agit de pathologies moins graves, anodines, banales... mais que les mots que nous employons sonnent "médicament" "soins" ... là où seul le temps est nécessaire : comment faire pour ne pas céder à la facilité de dire "prenez tant de gélule X et tant de Y, puis faites 3 prises de sang" parce que ça nous donne l'impression d'être scientifique, là où le scientifique justement devrait dire "Vous pouvez être rassuré, rien qui ne nécessite que vous vous inquiétiez, laissez faire le temps, vous verrez ça passera" ?
Quand on fait basculer le patient dans la surmédicalisation, volontairement ou non, par habitude ou non remise en question, que fait-il après ?
S'imagine-t-il atteint d'une pathologie si grave qu'il a dû prendre tous ces médicaments prescrits ?
Pense-t-il que désormais, tous ses maux devront se guérir à coups d'ordonnances sans fin ?
Quand les mots sortent de notre bouche de soignant, il se passe quoi, juste après ?
"Les frissons où l'amour et l'automne s'emmêlent, le noir où s'engloutissent notre foi, nos lois. Cette inquiétude sourde qui coule dans nos veines, qui nous saisit même après les plus grandes joies." (Veiller tard, Jean-Jacques Goldman)
Puis, le soir, quand nous quittons notre cabinet, il se passe quoi ? Il se passe quoi et avec qui ? Nous emportons un peu de la souffrance de l'autre, sans la vivre réellement. Sans la vivre physiquement.
Sans la vivre, vraiment ?
samedi 13 septembre 2014
Dans le sens du vent
"Dès que le vent soufflera je repartira. Dès que les vents tourneront nous nous en allerons" (Dès que le vent soufflera, Renaud)
Se faire porter par le courant, au propre comme au figuré, c'est très agréable.
Au propre, c'est comme flâner sur un matelas gonflable au fil de l'eau, sous un ciel d'été, par une chaleur idéale.
Au figuré, c'est, à mon sens, être un courant d'idées partagé par tous.
On se sent moins seul, on pense comme beaucoup d'autres.
Alors, ce billet va donner un peu l'impression de cracher dans la soupe.
Je vais aller un peu à contre courant, sans doute.
"Et tant pis la foule gronde, si je tourne pas dans la ronde. Papa quand je s'rai grand, je sais c'que je veux faire : je veux être minoritaire.
J'ai pas peur, j'ai pas peur, j'ai mon temps, mes heures, un cerveau, un ventre et un coeur. Et le droit à l'erreur" (Minoritaire, Jean-Jacques Goldman)
Bon, la foule, on n'ira quand même pas jusque là.
Mais quand même...
En ce moment, c'est la mode du "Président bashing". Qu'on soit d'accord ou pas avec sa politique, peu importe, la mode c'est de trouver tout ce qui est possible de trouver pour dénigrer.
Pas sûr qu'aux Etats-Unis, les opposants à Obama l'attaquent sur son physique, ses comportements... mais soit, c'est peut être là encore une exception culturelle française. Après tout, nos présidents ont tous été affublés de surnoms plus ou moins flatteurs, ça doit être habituel, mais j'ai du mal à participer à cela.
Juste par respect pour la fonction, et parce qu'à mon avis le débat doit se faire sur les idées et pas sur le physique ou la vie privée.
Pourtant, je me suis surpris à participer aussi à une part de lynchage du phobique administratif du moment (faut avouer que c'était tellement énorme cette histoire que ça s'y prêtait plutôt bien).
Et quel plaisir quand on voit que notre trait d'humour est diffusé et repris par d'autres. Ou retweeté pour ceux qui, comme moi, sont présents sur les réseaux sociaux.
Du coup, c'est bien, quand on sent le vent souffler, de trouver l'angle pour se mettre pile dans le sens du vent et se faire porter par le souffle collectif.
C'est grisant même.
C'est sans doute cela être populaire (peu importe l'échelle : populaire dans le quartier, dans la ville... ou plus loin encore).
Ca flatte beaucoup l'égo, et concrètement ça fait du bien.
Mais chez nous, on se flatte un peu trop l'égo en critiquant à tort et à travers. Nous sommes connus à travers le monde pour notre côté râleur. C'est dommage.
Il y avait eu une publicité que j'avais trouvée géniale à l'époque. Même si je n'écoute pas cette radio, je trouve qu'ils avaient visé très juste.
On veut que ça change, il faut que ça change ! Vite, y'en a marre. Mais par contre, faut pas changer ça, puis ça non plus on y tient, et puis ça, non c'est pas possible ou c'est la mort de notre métier...
Bref, faut qu'ça change... sans rien changer.
Quand on tient ce discours là, on est dans le sens du vent.
"Fais comme si j'avais pris la mer, j'ai sorti la grand voile et j'ai glissé sous le vent" (Sous le vent, Garou et Céline Dion)
Dans l'enseignement de la médecine générale aussi, on retrouve à peu de choses près les mêmes courants.
Il y a quelques jours, nous discutions dans un chat sur l'enseignement dans les études médicales (#MedEdFr). Est venue la question des "fameux" RSCA, ou Récits de Situation Complexes et Authentiques.
Ce sont des textes que les internes en médecine générale doivent écrire au cours de leur cursus, pour tenter de prendre du recul sur leur façon de soigner et se remettre en question.
A bien y regarder, certains billets de blog de mes collègues et amis sur la toile sont des RSCA grandeur nature !
L'effet de mode, c'est de dire que c'est nul un RSCA. Ouais quoi, c'est scolaire, on force les internes à les écrire. Ils ne sont plus en primaire et ils doivent faire des rédactions. C'est pas comme ça qu'on leur apprendra à soigner dans la vraie vie.
A condition d'être bien réalisé et bien accompagné par des enseignants de médecine générale (et ces conditions ne sont malheureusement pas toujours remplies), se remettre en question en se demandant si on a bien fait de soigner le patient comme ça, ou si notre façon de lui parler était la meilleure, et sur la foi de quels arguments scientifiques on dit ça, ce n'est pas apprendre à mieux soigner ?
Donc, oui, je trouve que les RSCA c'est pas si mal.
Mais c'est pas dans le sens du vent.
Autre discussion récente sur le fait que la médecine générale est une spécialité qui pose des diagnostics. Discussion sur Twitter avec des collègues et amis généralistes.
Etre dans le sens du vent, c'est dire que notre spécialité... euh... c'est déjà pas vraiment être dans le sens du vent que de dire que la médecine générale est une spécialité...
Bref, être dans le sens du vent, c'est dire que notre spécialité est vouée à disparaître, que les pouvoirs publics de tous bords veulent notre mort à tous, nous généralistes. Il faut que les choses changent, et vite, il faut réformer, changer le système.
Mais il ne faut pas changer notre façon d'exercer la médecine générale. Il faut que l'on puisse continuer à faire ce que nous faisons ou pensons faire (ça ne vous rappelle pas quelque chose ?).
Je suis parti du principe que nous diagnostiquons peu. En effet, nous nous basons sur beaucoup d'arguments quand un patient vient nous voir : des symptômes, la durée de ceux-ci, leur retentissement dans la vie de tous les jours, l'influence de certains traitements...
Tout cela nous amène à poser une hypothèse diagnostique, la plus probable compte tenus de tous les éléments à notre disposition.
Et plus de 8 fois sur 10, nous avons raison du premier coup. 80% d'hypothèses confirmées, c'est pas mal, non ?
Et bien, cette prise de position de ma part a été vécue comme une atteinte à la fonction de médecin généraliste.
J'ai visiblement blessé et attaqué mes amis et collègues dans leur représentation de notre beau métier, et l'ai condamné à disparaître puisque "nous ne diagnostiquons pas" et que de ce fait là, nous serons vite remplacés par d'autres métiers puisque nos compétences ne sont plus nécessaires. (Bisous en passant à @DrSelmer en espérant bientôt pouvoir discuter de cela autour d'une bonne bière belge).
Esprit de caste ou effet de mode, je me suis senti un peu seul dans cette discussion. C'est finalement pas très populaire d'avoir le vent de face. Puis ça chamboule un peu aussi. Ca déstabilise également.
"I'm your biggest fan, I'll follow you until you love me. Papa, paparazzi" (Paparazzi, Lady Gaga)
Mais du coup, ne faut-il intervenir que quand on est dans le sens du vent ? C'est donc un peu se renier, non ?
Faut-il être masochiste et prendre le vent de face, tout le temps ?
C'est un peu difficile de ne pas chercher à être populaire et dans le sens du vent sur les réseaux sociaux. Ou alors, il faut le faire juste avant "L'amour est dans le pré", pour que le vent vienne d'ailleurs rapidement, et qu'on oublie même que notre voilier était là... C'est ce qui m'a vraiment marqué après les dernières élections. Tout le monde était révolté le dimanche soir, le lundi matin... mais le lundi soir, le sujet le plus discuté concernait cette émission de la 6ème chaine...
"Non jamais je ne conteste, ni revendique ni ne proteste. Je ne sais faire qu'un seul geste, celui de retourner ma veste, de retourner ma veste, toujours du bon côté" (L'opportuniste, Jacques Dutronc)
Et vous ? Vous en pensez quoi ? Il va dans quel sens le vent ?
Se faire porter par le courant, au propre comme au figuré, c'est très agréable.
Au propre, c'est comme flâner sur un matelas gonflable au fil de l'eau, sous un ciel d'été, par une chaleur idéale.
Au figuré, c'est, à mon sens, être un courant d'idées partagé par tous.
On se sent moins seul, on pense comme beaucoup d'autres.
Alors, ce billet va donner un peu l'impression de cracher dans la soupe.
Je vais aller un peu à contre courant, sans doute.
"Et tant pis la foule gronde, si je tourne pas dans la ronde. Papa quand je s'rai grand, je sais c'que je veux faire : je veux être minoritaire.
J'ai pas peur, j'ai pas peur, j'ai mon temps, mes heures, un cerveau, un ventre et un coeur. Et le droit à l'erreur" (Minoritaire, Jean-Jacques Goldman)
Bon, la foule, on n'ira quand même pas jusque là.
Mais quand même...
En ce moment, c'est la mode du "Président bashing". Qu'on soit d'accord ou pas avec sa politique, peu importe, la mode c'est de trouver tout ce qui est possible de trouver pour dénigrer.
Pas sûr qu'aux Etats-Unis, les opposants à Obama l'attaquent sur son physique, ses comportements... mais soit, c'est peut être là encore une exception culturelle française. Après tout, nos présidents ont tous été affublés de surnoms plus ou moins flatteurs, ça doit être habituel, mais j'ai du mal à participer à cela.
Juste par respect pour la fonction, et parce qu'à mon avis le débat doit se faire sur les idées et pas sur le physique ou la vie privée.
Pourtant, je me suis surpris à participer aussi à une part de lynchage du phobique administratif du moment (faut avouer que c'était tellement énorme cette histoire que ça s'y prêtait plutôt bien).
Et quel plaisir quand on voit que notre trait d'humour est diffusé et repris par d'autres. Ou retweeté pour ceux qui, comme moi, sont présents sur les réseaux sociaux.
Du coup, c'est bien, quand on sent le vent souffler, de trouver l'angle pour se mettre pile dans le sens du vent et se faire porter par le souffle collectif.
C'est grisant même.
C'est sans doute cela être populaire (peu importe l'échelle : populaire dans le quartier, dans la ville... ou plus loin encore).
Ca flatte beaucoup l'égo, et concrètement ça fait du bien.
Mais chez nous, on se flatte un peu trop l'égo en critiquant à tort et à travers. Nous sommes connus à travers le monde pour notre côté râleur. C'est dommage.
Il y avait eu une publicité que j'avais trouvée géniale à l'époque. Même si je n'écoute pas cette radio, je trouve qu'ils avaient visé très juste.
On veut que ça change, il faut que ça change ! Vite, y'en a marre. Mais par contre, faut pas changer ça, puis ça non plus on y tient, et puis ça, non c'est pas possible ou c'est la mort de notre métier...
Bref, faut qu'ça change... sans rien changer.
Quand on tient ce discours là, on est dans le sens du vent.
"Fais comme si j'avais pris la mer, j'ai sorti la grand voile et j'ai glissé sous le vent" (Sous le vent, Garou et Céline Dion)
Dans l'enseignement de la médecine générale aussi, on retrouve à peu de choses près les mêmes courants.
Il y a quelques jours, nous discutions dans un chat sur l'enseignement dans les études médicales (#MedEdFr). Est venue la question des "fameux" RSCA, ou Récits de Situation Complexes et Authentiques.
Ce sont des textes que les internes en médecine générale doivent écrire au cours de leur cursus, pour tenter de prendre du recul sur leur façon de soigner et se remettre en question.
A bien y regarder, certains billets de blog de mes collègues et amis sur la toile sont des RSCA grandeur nature !
L'effet de mode, c'est de dire que c'est nul un RSCA. Ouais quoi, c'est scolaire, on force les internes à les écrire. Ils ne sont plus en primaire et ils doivent faire des rédactions. C'est pas comme ça qu'on leur apprendra à soigner dans la vraie vie.
A condition d'être bien réalisé et bien accompagné par des enseignants de médecine générale (et ces conditions ne sont malheureusement pas toujours remplies), se remettre en question en se demandant si on a bien fait de soigner le patient comme ça, ou si notre façon de lui parler était la meilleure, et sur la foi de quels arguments scientifiques on dit ça, ce n'est pas apprendre à mieux soigner ?
Donc, oui, je trouve que les RSCA c'est pas si mal.
Mais c'est pas dans le sens du vent.
Autre discussion récente sur le fait que la médecine générale est une spécialité qui pose des diagnostics. Discussion sur Twitter avec des collègues et amis généralistes.
Etre dans le sens du vent, c'est dire que notre spécialité... euh... c'est déjà pas vraiment être dans le sens du vent que de dire que la médecine générale est une spécialité...
Bref, être dans le sens du vent, c'est dire que notre spécialité est vouée à disparaître, que les pouvoirs publics de tous bords veulent notre mort à tous, nous généralistes. Il faut que les choses changent, et vite, il faut réformer, changer le système.
Mais il ne faut pas changer notre façon d'exercer la médecine générale. Il faut que l'on puisse continuer à faire ce que nous faisons ou pensons faire (ça ne vous rappelle pas quelque chose ?).
Je suis parti du principe que nous diagnostiquons peu. En effet, nous nous basons sur beaucoup d'arguments quand un patient vient nous voir : des symptômes, la durée de ceux-ci, leur retentissement dans la vie de tous les jours, l'influence de certains traitements...
Tout cela nous amène à poser une hypothèse diagnostique, la plus probable compte tenus de tous les éléments à notre disposition.
Et plus de 8 fois sur 10, nous avons raison du premier coup. 80% d'hypothèses confirmées, c'est pas mal, non ?
Et bien, cette prise de position de ma part a été vécue comme une atteinte à la fonction de médecin généraliste.
J'ai visiblement blessé et attaqué mes amis et collègues dans leur représentation de notre beau métier, et l'ai condamné à disparaître puisque "nous ne diagnostiquons pas" et que de ce fait là, nous serons vite remplacés par d'autres métiers puisque nos compétences ne sont plus nécessaires. (Bisous en passant à @DrSelmer en espérant bientôt pouvoir discuter de cela autour d'une bonne bière belge).
Esprit de caste ou effet de mode, je me suis senti un peu seul dans cette discussion. C'est finalement pas très populaire d'avoir le vent de face. Puis ça chamboule un peu aussi. Ca déstabilise également.
"I'm your biggest fan, I'll follow you until you love me. Papa, paparazzi" (Paparazzi, Lady Gaga)
Mais du coup, ne faut-il intervenir que quand on est dans le sens du vent ? C'est donc un peu se renier, non ?
Faut-il être masochiste et prendre le vent de face, tout le temps ?
C'est un peu difficile de ne pas chercher à être populaire et dans le sens du vent sur les réseaux sociaux. Ou alors, il faut le faire juste avant "L'amour est dans le pré", pour que le vent vienne d'ailleurs rapidement, et qu'on oublie même que notre voilier était là... C'est ce qui m'a vraiment marqué après les dernières élections. Tout le monde était révolté le dimanche soir, le lundi matin... mais le lundi soir, le sujet le plus discuté concernait cette émission de la 6ème chaine...
"Non jamais je ne conteste, ni revendique ni ne proteste. Je ne sais faire qu'un seul geste, celui de retourner ma veste, de retourner ma veste, toujours du bon côté" (L'opportuniste, Jacques Dutronc)
Et vous ? Vous en pensez quoi ? Il va dans quel sens le vent ?
samedi 2 août 2014
Le pied dans l'ouverture de la porte
"Don't give up, 'cause you have friends. Don't give up, you're not the only one. Don't give up, no reason to be ashamed. Don't give up, you still have us. Don't give up now, we're proud of who you are. Don't give up, you know it's never been easy" (Don't give up, Peter Gabriel et Kate Bush)
(N'abandonne pas, car tu as des amis. N'abandonne pas, tu n'es pas le seul. N'abandonne pas, tu n'as pas à avoir honte. N'abandonne pas, tu nous as toujours. N'abandonne pas, nous sommes fier de toi. N'abandonne pas, tu sais que cela n'a jamais été facile)
Comme régulièrement ces temps-ci Une fois n'est pas coutume, j'ai envie de râler un peu.
Pas contre le système, pas contre les politiques, pas contre les patients.
Contre nous. Oui, nous. Les Médecins Généralistes.
Et plus précisément certains présents sur Twitter, même s'ils sont des amis proches.
La situation de la profession n'est pas rose, loin de là. Toutes les études le montrent.
Les pouvoirs publics semblent parfois embourbés dans des réformes qu'ils ont du mal à appliquer, et qui se soldent trop souvent par de nouvelles contraintes.
Certains collègues ont déjà abandonné. Je n'ai pas envie de les rejoindre sur ce terrain.
Mes engagements m'amènent à avoir des réunions auprès de nos Ministres de tutelle (ou parce que pour simplifier la chose, nous avons un Ministère qui gère la santé, et un autre qui gère la façon dont la médecine est enseignée pour pouvoir ensuite entrer dans le monde de la santé).
Jusqu'à présent il était habituel de voir l'un et l'autre se renvoyer la balle, avec le refrain facile du "ah mais ce point précis ne dépend pas de moi..." et la partie de ping-pong qui aboutit bien souvent à ne jamais prendre de décision.
Je ne souhaite pas ici rentrer dans des considérations politiciennes, ce n'est pas mon but, et je ne souhaite pas que ces propos puissent être récupérés comme cela.
Je note juste qu'à ne jamais perdre espoir de voir les deux Ministères discuter ensemble, le même jour, au même endroit, avec les représentants des MG futurs, présents et enseignants, cette rencontre a fini par voir le jour.
Tout ce qui y a été dit s'annonce prometteur, et signe d'une éclaircie dans un ciel sombre jusqu'ici.
Je ne suis pas dupe, il faudra passer de la parole aux actes, mais nous sommes plusieurs à avoir entendu ce discours et veillerons, j'en suis sûr, à le voir se concrétiser.
Eternel optimiste je suis. Eternel optimiste je veux rester...
Mais c'est un sentiment loin d'être partagé par mes collègues.
Je ne peux nier que certains aient été échaudés. Je ne peux nier qu'ils essaient juste amicalement de me mettre en garde.
"J'veux juste aller mal et y'a pas d'mal à ça, traîner, manger que dalle, écouter Barbara" (Non, non, non (écouter Barbara), Camélia Jordana)
C'est l'impression que j'ai.
"Nous allons mal, et rien de changera jamais. Fin de la discussion"
Ca sert à quoi alors, de chercher à faire bouger les lignes ?
Si je m'étais cantonné à cela, je n'aurais pas cherché à établir un dialogue au sein de ma faculté de médecine, avec les plus hauts dirigeants.
On me disait que ce n'était pas la peine. Pire, c'était peine perdue.
Je n'ai jamais trouvé porte close pourtant.
J'ai défendu mes positions, nous avons trouvé des terrains d'entente.
Tout n'est pas devenu rose du jour au lendemain, mais il y a quelques éclaircies dans un ciel qui était annoncé comme "gris sans espoir".
"J'ai bien fait des pieds et des mains pour éviter qu'au petit matin, sans exception depuis des mois tu ne te lèves de ce pied-là" (Des pieds et des mains, Lynda Lemay)
J'ai récemment participé à l'enregistrement du Magazine de la Santé.
Outre le fait de voir le sourire de mes zèbres quand leur père était à l'écran, outre le plaisir sincère et enthousiaste que j'ai pris à y participer, outre le stress qui était le mien de découvrir des questions auxquelles je ne m'attendais pas du tout, je garde un excellent souvenir de cette expérience.
J'y suis allé en tant que médecin généraliste pour répondre à des questions de médecine générale.
Alors, oui, le médecin généraliste ne fait pas que des petits bobos dans sa vie, et je suis le premier à le dire.
Mais Rome ne s'est pas faite en un jour.
Il nous faut construire petit à petit notre présence et nous faire reconnaître pour ce que nous sommes : des professionnels des soins primaires, compétents dans beaucoup de domaines.
Nous n'avons pas à rougir de ce que nous sommes, ni à nous cantonner à une simple spécialité d'exercice.
Mais je refuse que nous fassions la fine bouche, partout, tout le temps, pour tout.
Je refuse qu'on n'aille pas répondre à des questions sur "que faire avant de partir en vacances", sous prétexte que "ce n'est pas assez noble pour nous".
Un pas à la fois.
Nous gagnons et gagnerons nos lettres de noblesse.
Nous parlerons un jour des choses à faire avant de partir en vacances. Et de tout le reste.
Mettons le pied pour coincer la porte entrouverte, et ne jamais la laisser se refermer.
(N'abandonne pas, car tu as des amis. N'abandonne pas, tu n'es pas le seul. N'abandonne pas, tu n'as pas à avoir honte. N'abandonne pas, tu nous as toujours. N'abandonne pas, nous sommes fier de toi. N'abandonne pas, tu sais que cela n'a jamais été facile)
Pas contre le système, pas contre les politiques, pas contre les patients.
Contre nous. Oui, nous. Les Médecins Généralistes.
Et plus précisément certains présents sur Twitter, même s'ils sont des amis proches.
La situation de la profession n'est pas rose, loin de là. Toutes les études le montrent.
Les pouvoirs publics semblent parfois embourbés dans des réformes qu'ils ont du mal à appliquer, et qui se soldent trop souvent par de nouvelles contraintes.
Certains collègues ont déjà abandonné. Je n'ai pas envie de les rejoindre sur ce terrain.
Mes engagements m'amènent à avoir des réunions auprès de nos Ministres de tutelle (ou parce que pour simplifier la chose, nous avons un Ministère qui gère la santé, et un autre qui gère la façon dont la médecine est enseignée pour pouvoir ensuite entrer dans le monde de la santé).
Jusqu'à présent il était habituel de voir l'un et l'autre se renvoyer la balle, avec le refrain facile du "ah mais ce point précis ne dépend pas de moi..." et la partie de ping-pong qui aboutit bien souvent à ne jamais prendre de décision.
Je ne souhaite pas ici rentrer dans des considérations politiciennes, ce n'est pas mon but, et je ne souhaite pas que ces propos puissent être récupérés comme cela.
Je note juste qu'à ne jamais perdre espoir de voir les deux Ministères discuter ensemble, le même jour, au même endroit, avec les représentants des MG futurs, présents et enseignants, cette rencontre a fini par voir le jour.
Tout ce qui y a été dit s'annonce prometteur, et signe d'une éclaircie dans un ciel sombre jusqu'ici.
Je ne suis pas dupe, il faudra passer de la parole aux actes, mais nous sommes plusieurs à avoir entendu ce discours et veillerons, j'en suis sûr, à le voir se concrétiser.
Eternel optimiste je suis. Eternel optimiste je veux rester...
Mais c'est un sentiment loin d'être partagé par mes collègues.
Je ne peux nier que certains aient été échaudés. Je ne peux nier qu'ils essaient juste amicalement de me mettre en garde.
"J'veux juste aller mal et y'a pas d'mal à ça, traîner, manger que dalle, écouter Barbara" (Non, non, non (écouter Barbara), Camélia Jordana)
C'est l'impression que j'ai.
"Nous allons mal, et rien de changera jamais. Fin de la discussion"
Ca sert à quoi alors, de chercher à faire bouger les lignes ?
Si je m'étais cantonné à cela, je n'aurais pas cherché à établir un dialogue au sein de ma faculté de médecine, avec les plus hauts dirigeants.
On me disait que ce n'était pas la peine. Pire, c'était peine perdue.
Je n'ai jamais trouvé porte close pourtant.
J'ai défendu mes positions, nous avons trouvé des terrains d'entente.
Tout n'est pas devenu rose du jour au lendemain, mais il y a quelques éclaircies dans un ciel qui était annoncé comme "gris sans espoir".
"J'ai bien fait des pieds et des mains pour éviter qu'au petit matin, sans exception depuis des mois tu ne te lèves de ce pied-là" (Des pieds et des mains, Lynda Lemay)
J'ai récemment participé à l'enregistrement du Magazine de la Santé.
Outre le fait de voir le sourire de mes zèbres quand leur père était à l'écran, outre le plaisir sincère et enthousiaste que j'ai pris à y participer, outre le stress qui était le mien de découvrir des questions auxquelles je ne m'attendais pas du tout, je garde un excellent souvenir de cette expérience.
J'y suis allé en tant que médecin généraliste pour répondre à des questions de médecine générale.
Alors, oui, le médecin généraliste ne fait pas que des petits bobos dans sa vie, et je suis le premier à le dire.
Mais Rome ne s'est pas faite en un jour.
Il nous faut construire petit à petit notre présence et nous faire reconnaître pour ce que nous sommes : des professionnels des soins primaires, compétents dans beaucoup de domaines.
Nous n'avons pas à rougir de ce que nous sommes, ni à nous cantonner à une simple spécialité d'exercice.
Mais je refuse que nous fassions la fine bouche, partout, tout le temps, pour tout.
Je refuse qu'on n'aille pas répondre à des questions sur "que faire avant de partir en vacances", sous prétexte que "ce n'est pas assez noble pour nous".
Un pas à la fois.
Nous gagnons et gagnerons nos lettres de noblesse.
Nous parlerons un jour des choses à faire avant de partir en vacances. Et de tout le reste.
Mettons le pied pour coincer la porte entrouverte, et ne jamais la laisser se refermer.
jeudi 17 juillet 2014
Le clan des Siciliens
"Les voilà! les voilà! c´est vous! quelle merveille! Par ici les manteaux, par là les bouteilles. Les voisins sont montés en chemise de nuit, on les applaudit, ce sont des amis. Un pique nique en hiver sur une moquette, c´est la faim, c´est la joie, la bonne franquette. Et ça fume et ça boit, ça chante et ça rit. Je peux vivre sans pain mais pas sans amis..." (La bonne franquette, Herbert Pagani)
Ces paroles de chanson, je ne les connaissais pas avant de connaître celle qui est ensuite devenue @MmeCalaf il y a 14 ans maintenant.
Disons que je ne suis pas le seul à connaître des chansons... peu connues...
L'amitié. C'est une valeur universelle.
Même si à y regarder de plus près, on a toujours un truc à dire sur l'un ou sur l'autre. C'est la nature humaine qui doit vouloir ça. Ou alors nous sommes tellement peu sûrs de nous, que nous cherchons à dédouaner ce manque de confiance dans le reproche fait aux autres.
Il n'y a aucune amitié sincère alors ?
Et si l'amitié c'était aussi de savoir reconnaître ce qu'on aime chez l'autre, sans nier les petits riens qu'on apprécie moins. L'amitié c'est donc être lucide et sincère en somme.
J'aime bien ça.
Les moments où le temps passe si vite qu'on ne s'en rend plus compte. Où l'on peut se parler comme si on s'était vu encore la veille, alors que la dernière rencontre date de plusieurs mois ou de plusieurs années.
"Si tu aimes les éclaircies, mon enfant, mon enfant, prendre un bain de minuit dans le grand océan, si tu aimes la mauvaise vie, ton reflet dans l´étang, si tu veux tes amis près de toi, tout le temps..." (Ton héritage, Benjamin Biolay)
Les amis, la famille. La famille dont on hérite à la naissance. La famille qu'on se choisit et qu'on appelle "les amis".
C'est pareil. C'est l'un des pieds du trépied dont j'ai régulièrement parlé ici.
La famille, c'est pour moi se retrouver comme dans la série que je regardais dans ma jeunesse. "Une famille formidable". Dans ses débuts, bien avant qu'ils n'étirent le concept en longueur, en lui faisant perdre pas mal de sens je trouve.
Mais bref, cette famille qui pouvait traverser des moments de joie intense, des difficultés, mais qui se retrouvait toujours, à la fin de l'épisode, autour d'une table, dans une bonne ambiance.
Aimer l'autre, en respectant ses différences.
La famille, pour moi, c'est me retrouver avec mon "clan des siciliens", autour des lasagnes préparées par la mamma qui n'a rien d'une sicilienne sur le plan génétique, mais beaucoup sur les autres plans.
C'est se retrouver autour des desserts "traditionnels". C'est discuter, rire. Ne pas être d'accord parfois. Se dire aussi que, oui, vraiment, la mamma parle autant qu'une vraie sicilienne. Mais ne pas voir le temps passer.
C'est bizarre à quel point les clichés de la famille sicilienne peuvent se retrouver dans ces moments passés. Je n'ai pas pourtant l'impression d'avoir été élevé par un padre traditionaliste, au contraire, mais il faut croire qu'une partie de cet esprit est génétique.
J'aimerais me dire que tout le monde peut vivre des moments comme ça. J'aimerais me dire qu'il suffit de ne pas se prendre au sérieux, et de prendre la vie comme elle vient. Et que ces moments là sont autant de petits cailloux semés sur le chemin de nos vies pour pouvoir contempler un jour tout ce que nous aurons parcouru ensemble.
"Moi dans la maison vide, dans la chambre vide, je passe ma vie à écouter cette symphonie qui était si belle et qui me rappelle un amour fini" (Dans la maison vide, Michel Polnareff)
"Docteur, depuis qu'il est mort, je n'arrive plus à vivre. Je n'arrive plus à avancer. Je ne mange plus".
Tous les médecins généralistes qui liront ce billet liront cette phrase comme un écho à leurs propres expériences professionnelles. Nous avons tous entendu cela un jour ou l'autre.
Comment ça se passe quand on a eu l'habitude d'avoir de l'animation dans un foyer, et que d'un coup le silence y règne.
Comment fait-on pour surmonter cela ? On parle au disparu, quitte à passer pour un imbécile aux yeux des autres ?
Mais surtout, quand on n'a pas eu de clan, quand on n'a pas entretenu cet esprit de famille, ou qu'on n'a pas veillé à avoir un cercle de famille choisie (comprenez d'amis) sur qui compter, on fait comment ?
"La maison si nette, qu'elle en est suspecte, comme tous ces endroits où l'on ne vit pas. Les êtres ont cédés, perdu la bagarre, les choses ont gagné, c'est leur territoire.
Le temps qui nous casse, ne la change pas, les vivants se fanent, mais les ombres pas. Tout va, tout fonctionne, sans but sans pourquoi, d'hiver en automne, ni fièvre ni froid" (La vie par procuration, Jean-Jacques Goldman)
Tic. Tac. Tic. Tac.
J'imagine une scène de cinéma. Une horloge franc-comtoise responsable de ce tic-tac.
Finalement, je préfère que la mamma parle fort. Et que le padre fasse ses blagues à deux balles. Et que les zèbres s'amusent. Et qu'entre frangins on continue à se taquiner.
Et que je retrouve les twittos aussi. Ca fait un bail que je ne les ai pas vus. Mais on reprendra le fil de notre discussion, comme d'habitude.
Il paraît qu'on vieillit comme on a vécu.
Je vous raconte pas le bordel que ça va être.
Mais on va finir tous autour d'un repas. A table.
Générique. Pas de mot "FIN". On va l'étirer en longueur aussi le concept. Après tout...
Ces paroles de chanson, je ne les connaissais pas avant de connaître celle qui est ensuite devenue @MmeCalaf il y a 14 ans maintenant.
Disons que je ne suis pas le seul à connaître des chansons... peu connues...
L'amitié. C'est une valeur universelle.
Même si à y regarder de plus près, on a toujours un truc à dire sur l'un ou sur l'autre. C'est la nature humaine qui doit vouloir ça. Ou alors nous sommes tellement peu sûrs de nous, que nous cherchons à dédouaner ce manque de confiance dans le reproche fait aux autres.
Il n'y a aucune amitié sincère alors ?
Et si l'amitié c'était aussi de savoir reconnaître ce qu'on aime chez l'autre, sans nier les petits riens qu'on apprécie moins. L'amitié c'est donc être lucide et sincère en somme.
J'aime bien ça.
Les moments où le temps passe si vite qu'on ne s'en rend plus compte. Où l'on peut se parler comme si on s'était vu encore la veille, alors que la dernière rencontre date de plusieurs mois ou de plusieurs années.
"Si tu aimes les éclaircies, mon enfant, mon enfant, prendre un bain de minuit dans le grand océan, si tu aimes la mauvaise vie, ton reflet dans l´étang, si tu veux tes amis près de toi, tout le temps..." (Ton héritage, Benjamin Biolay)
Les amis, la famille. La famille dont on hérite à la naissance. La famille qu'on se choisit et qu'on appelle "les amis".
C'est pareil. C'est l'un des pieds du trépied dont j'ai régulièrement parlé ici.
La famille, c'est pour moi se retrouver comme dans la série que je regardais dans ma jeunesse. "Une famille formidable". Dans ses débuts, bien avant qu'ils n'étirent le concept en longueur, en lui faisant perdre pas mal de sens je trouve.
Mais bref, cette famille qui pouvait traverser des moments de joie intense, des difficultés, mais qui se retrouvait toujours, à la fin de l'épisode, autour d'une table, dans une bonne ambiance.
Aimer l'autre, en respectant ses différences.
La famille, pour moi, c'est me retrouver avec mon "clan des siciliens", autour des lasagnes préparées par la mamma qui n'a rien d'une sicilienne sur le plan génétique, mais beaucoup sur les autres plans.
C'est se retrouver autour des desserts "traditionnels". C'est discuter, rire. Ne pas être d'accord parfois. Se dire aussi que, oui, vraiment, la mamma parle autant qu'une vraie sicilienne. Mais ne pas voir le temps passer.
C'est bizarre à quel point les clichés de la famille sicilienne peuvent se retrouver dans ces moments passés. Je n'ai pas pourtant l'impression d'avoir été élevé par un padre traditionaliste, au contraire, mais il faut croire qu'une partie de cet esprit est génétique.
J'aimerais me dire que tout le monde peut vivre des moments comme ça. J'aimerais me dire qu'il suffit de ne pas se prendre au sérieux, et de prendre la vie comme elle vient. Et que ces moments là sont autant de petits cailloux semés sur le chemin de nos vies pour pouvoir contempler un jour tout ce que nous aurons parcouru ensemble.
"Moi dans la maison vide, dans la chambre vide, je passe ma vie à écouter cette symphonie qui était si belle et qui me rappelle un amour fini" (Dans la maison vide, Michel Polnareff)
"Docteur, depuis qu'il est mort, je n'arrive plus à vivre. Je n'arrive plus à avancer. Je ne mange plus".
Tous les médecins généralistes qui liront ce billet liront cette phrase comme un écho à leurs propres expériences professionnelles. Nous avons tous entendu cela un jour ou l'autre.
Comment ça se passe quand on a eu l'habitude d'avoir de l'animation dans un foyer, et que d'un coup le silence y règne.
Comment fait-on pour surmonter cela ? On parle au disparu, quitte à passer pour un imbécile aux yeux des autres ?
Mais surtout, quand on n'a pas eu de clan, quand on n'a pas entretenu cet esprit de famille, ou qu'on n'a pas veillé à avoir un cercle de famille choisie (comprenez d'amis) sur qui compter, on fait comment ?
"La maison si nette, qu'elle en est suspecte, comme tous ces endroits où l'on ne vit pas. Les êtres ont cédés, perdu la bagarre, les choses ont gagné, c'est leur territoire.
Le temps qui nous casse, ne la change pas, les vivants se fanent, mais les ombres pas. Tout va, tout fonctionne, sans but sans pourquoi, d'hiver en automne, ni fièvre ni froid" (La vie par procuration, Jean-Jacques Goldman)
Tic. Tac. Tic. Tac.
J'imagine une scène de cinéma. Une horloge franc-comtoise responsable de ce tic-tac.
Finalement, je préfère que la mamma parle fort. Et que le padre fasse ses blagues à deux balles. Et que les zèbres s'amusent. Et qu'entre frangins on continue à se taquiner.
Et que je retrouve les twittos aussi. Ca fait un bail que je ne les ai pas vus. Mais on reprendra le fil de notre discussion, comme d'habitude.
Il paraît qu'on vieillit comme on a vécu.
Je vous raconte pas le bordel que ça va être.
Mais on va finir tous autour d'un repas. A table.
Générique. Pas de mot "FIN". On va l'étirer en longueur aussi le concept. Après tout...
dimanche 15 juin 2014
La Médecine Générale en finale ?
"Le temps passe.
Devant nous, l'impasse.
Avant le passage,
sachons être sages.
Je sais la faiblesse de mes mots qui blessent. Je m'en veux tant.
Le temps court sans aucun recours. Mes peurs m'encouragent à te mordre de rage, un dernier reproche et le mur se rapproche. Je m'en veux tant." (Six pieds sous terre, Mozart l'Opéra Rock)
Il y a quelques jours, @gendesalp publiait un billet ici en guise de bilan et de point final à son activité de médecin généraliste libéral.
Comme beaucoup d'autres, j'imagine, j'ai accueilli la nouvelle à la manière d'une gifle en pleine figure.
Tous ses arguments résonnent parfaitement chez beaucoup d'entre nous, médecins généralistes.
La course à une augmentation de notre rémunération pour faire face aux charges, la diminution de nos semaines de vacances pour tenter de compenser... la course sans fin, avec l'arrière pensée qu'il ne faut pas se plaindre, parce qu'à bien y regarder il y a des citoyens bien plus en difficulté que nous.
Une petite dose supplémentaire de "t'as signé, c'est pour en chier" qu'on entend souvent, entre deux "on vous a payé vos études" et "arrêtez de vous plaindre bande de nantis", et on en arrive au constat partagé : Quid de l'avenir de la médecine générale en France ?
J'avais déjà eu l'occasion d'en parler, voire de pousser des coups de gueule ici et là ou encore là.
Le temps passe. Peu de choses changent. Les découragements s'amoncèlent.
"Elle attend que le monde change, elle attend que changent les temps. Elle attend que ce monde étrange se perde et que tournent les vents. Inexorablement, elle attend" (Elle attend, Jean-Jacques Goldman)
Alors, une fois n'est pas coutume, je vais un peu sortir du monde des bisounours pour parler de nous. J'entends "nous" les médecins généralistes. Et notamment ceux des réseaux sociaux, très actifs.
Il plane en ce moment une sorte d'indignation mêlée à une résignation viscérale.
Le choses vont mal. Nous allons droit dans le mur.
Nous nous lamentons, nous nous offusquons, nous sommes parfois révoltés.
Et après ?
Une fois ces sentiments de colère et de rage passés, que faisons-nous ?
Nous retournons sagement à nos occupations.
Oh, parfois, nous râlons un peu plus fort, si fort que d'autres que nous (les généralistes) l'entendent, et s'indignent de concert.
Mais nous restons là. A attendre que le monde change. Qu'il change comme nous le voulons, mais qu'il change sans que nous intervenions. Parce que, bon, faut pas pousser, on a des milliards de choses à faire, et beaucoup trop pour s'investir et influencer les choix et les décisions de ceux qui sont aux responsabilités.
"Trois tours d'périph, fenêtre ouverte, j'vois passer c'qu'on aurait pu être. Oui, je t'en veux, mais moins qu'à moi" (Tout s'efface, Patrick Bruel)
Je m'en veux. Je n'en fais sans doute pas assez.
Nous, médecins généralistes, pourrions connaître un avenir tellement plus encourageant que celui qui nous est promis. Nous pourrions faire tellement, en collaboration avec nos confrères des autres spécialités. Mais nous restons là, contemplatifs. Nous laissons les autres faire. En râlant. Mais sans bouger. Ou si peu.
En ces moments de coupe du monde de football, nous râlons sur les joueurs et l'arbitre devant notre écran, sans vouloir chausser les crampons et aller sur le terrain. C'est plus facile. On peut ensuite avoir le beau rôle, à coups de "je vous l'avais bien dit" ou de "je savais parfaitement ce qu'il fallait faire, c'était évident, et facile".
"On dit dans la rue que pour toi y a plus d'issue, que pour sauver ton honneur, il faut quitter cette fleur" (On dit dans la rue, Roméo et Juliette)
La situation est perdue d'avance ?
Il n'y a plus rien à faire ?
Nous allons tous, un jour ou l'autre dévisser notre plaque, nous les médecins généralistes ?
Et si on réveillait enfin un peu ?
Et si nous pesions un peu plus lourd dans les négociations, les décisions ?
Nous sommes soi-disant le pivot du système de soins... Je nous vois bien faire le culboto : nous bougeons beaucoup, mais nous restons sur-place.
J'entends déjà venir les critiques, je suis un syndicaliste... bla bla bla... mais toi t'as le temps... bla bla bla...
"Je prie les hommes, je prie les rois, d'être plus homme, d'être moins roi. Je prie les yeux, les yeux défaits ce que les cieux, ne voient jamais. Je prie l'amour, et nos cerveaux, qu'on imagine et qu'on se bouge et sans trop compter sur là-haut" (Prière païenne, Céline Dion)
Voilà.
Je prie. Pour que nous nous réveillons un peu.
Nous pouvons faire des actions collectives. Je ne parle pas de grève ou de choses de ce genre. Les syndicalistes pur souche auront tout le loisir de la décréter s'ils la souhaitent.
Non, je parle d'être force de proposition.
D'être un lobby. Pas dans le mauvais sens du terme. Pas pour défendre de petits intérêts particuliers.
Mais pour peser sur les négociations.
Parce qu'au final, ce sont nos patients, à tous, qui vont souffrir si nous partons.
Alors quel camp choisissez vous : celui des commentateurs sportifs, ou celui des joueurs ?
En sport, que l'on gagne ou qu'on perde un titre, on peut se targuer de l'avoir défendu.
Qu'allons-nous choisir de faire pour l'avenir de notre profession ?
Je serai sur le terrain. J'y suis déjà.
Mais nous ne sommes pas assez nombreux pour ce sport collectif.
J'entends déjà les commentateurs nous dire que nous aurions dû faire autrement.
J'ai du mal à voir l'arbitre. Il nous reste encore combien de temps avant le coup de sifflet final ?
Le temps court sans aucun recours. Mes peurs m'encouragent à te mordre de rage, un dernier reproche et le mur se rapproche. Je m'en veux tant." (Six pieds sous terre, Mozart l'Opéra Rock)
Il y a quelques jours, @gendesalp publiait un billet ici en guise de bilan et de point final à son activité de médecin généraliste libéral.
Comme beaucoup d'autres, j'imagine, j'ai accueilli la nouvelle à la manière d'une gifle en pleine figure.
Tous ses arguments résonnent parfaitement chez beaucoup d'entre nous, médecins généralistes.
La course à une augmentation de notre rémunération pour faire face aux charges, la diminution de nos semaines de vacances pour tenter de compenser... la course sans fin, avec l'arrière pensée qu'il ne faut pas se plaindre, parce qu'à bien y regarder il y a des citoyens bien plus en difficulté que nous.
Une petite dose supplémentaire de "t'as signé, c'est pour en chier" qu'on entend souvent, entre deux "on vous a payé vos études" et "arrêtez de vous plaindre bande de nantis", et on en arrive au constat partagé : Quid de l'avenir de la médecine générale en France ?
J'avais déjà eu l'occasion d'en parler, voire de pousser des coups de gueule ici et là ou encore là.
Le temps passe. Peu de choses changent. Les découragements s'amoncèlent.
"Elle attend que le monde change, elle attend que changent les temps. Elle attend que ce monde étrange se perde et que tournent les vents. Inexorablement, elle attend" (Elle attend, Jean-Jacques Goldman)
Alors, une fois n'est pas coutume, je vais un peu sortir du monde des bisounours pour parler de nous. J'entends "nous" les médecins généralistes. Et notamment ceux des réseaux sociaux, très actifs.
Il plane en ce moment une sorte d'indignation mêlée à une résignation viscérale.
Le choses vont mal. Nous allons droit dans le mur.
Nous nous lamentons, nous nous offusquons, nous sommes parfois révoltés.
Et après ?
Une fois ces sentiments de colère et de rage passés, que faisons-nous ?
Nous retournons sagement à nos occupations.
Oh, parfois, nous râlons un peu plus fort, si fort que d'autres que nous (les généralistes) l'entendent, et s'indignent de concert.
Mais nous restons là. A attendre que le monde change. Qu'il change comme nous le voulons, mais qu'il change sans que nous intervenions. Parce que, bon, faut pas pousser, on a des milliards de choses à faire, et beaucoup trop pour s'investir et influencer les choix et les décisions de ceux qui sont aux responsabilités.
"Trois tours d'périph, fenêtre ouverte, j'vois passer c'qu'on aurait pu être. Oui, je t'en veux, mais moins qu'à moi" (Tout s'efface, Patrick Bruel)
Je m'en veux. Je n'en fais sans doute pas assez.
Nous, médecins généralistes, pourrions connaître un avenir tellement plus encourageant que celui qui nous est promis. Nous pourrions faire tellement, en collaboration avec nos confrères des autres spécialités. Mais nous restons là, contemplatifs. Nous laissons les autres faire. En râlant. Mais sans bouger. Ou si peu.
En ces moments de coupe du monde de football, nous râlons sur les joueurs et l'arbitre devant notre écran, sans vouloir chausser les crampons et aller sur le terrain. C'est plus facile. On peut ensuite avoir le beau rôle, à coups de "je vous l'avais bien dit" ou de "je savais parfaitement ce qu'il fallait faire, c'était évident, et facile".
"On dit dans la rue que pour toi y a plus d'issue, que pour sauver ton honneur, il faut quitter cette fleur" (On dit dans la rue, Roméo et Juliette)
La situation est perdue d'avance ?
Il n'y a plus rien à faire ?
Nous allons tous, un jour ou l'autre dévisser notre plaque, nous les médecins généralistes ?
Et si on réveillait enfin un peu ?
Et si nous pesions un peu plus lourd dans les négociations, les décisions ?
Nous sommes soi-disant le pivot du système de soins... Je nous vois bien faire le culboto : nous bougeons beaucoup, mais nous restons sur-place.
J'entends déjà venir les critiques, je suis un syndicaliste... bla bla bla... mais toi t'as le temps... bla bla bla...
"Je prie les hommes, je prie les rois, d'être plus homme, d'être moins roi. Je prie les yeux, les yeux défaits ce que les cieux, ne voient jamais. Je prie l'amour, et nos cerveaux, qu'on imagine et qu'on se bouge et sans trop compter sur là-haut" (Prière païenne, Céline Dion)
Voilà.
Je prie. Pour que nous nous réveillons un peu.
Nous pouvons faire des actions collectives. Je ne parle pas de grève ou de choses de ce genre. Les syndicalistes pur souche auront tout le loisir de la décréter s'ils la souhaitent.
Non, je parle d'être force de proposition.
D'être un lobby. Pas dans le mauvais sens du terme. Pas pour défendre de petits intérêts particuliers.
Mais pour peser sur les négociations.
Parce qu'au final, ce sont nos patients, à tous, qui vont souffrir si nous partons.
Alors quel camp choisissez vous : celui des commentateurs sportifs, ou celui des joueurs ?
En sport, que l'on gagne ou qu'on perde un titre, on peut se targuer de l'avoir défendu.
Qu'allons-nous choisir de faire pour l'avenir de notre profession ?
Je serai sur le terrain. J'y suis déjà.
Mais nous ne sommes pas assez nombreux pour ce sport collectif.
J'entends déjà les commentateurs nous dire que nous aurions dû faire autrement.
J'ai du mal à voir l'arbitre. Il nous reste encore combien de temps avant le coup de sifflet final ?
jeudi 1 mai 2014
Le bonheur, si je veux
"A happy girl, a happy boy, a happy son, a happy friend all living in a happy world, all living in a lonely world" (Naive song, Mirwais)
(Une fille heureuse, un garçon heureux, un fils heureux, un ami heureux vivant tous dans un monde heureux, vivant tous dans un monde seul)
Ce billet me démange depuis un moment.C'est quoi le bonheur ? Qu'est-ce qui nous rend heureux ?
Je lis régulièrement sur les réseaux sociaux ou ailleurs des messages ou des billets très inquisiteurs sur le bonheur. Un peu dans l'idée de "C'est quand le bonheur" de Cali.
Comme si le bonheur ne dépendait que des autres, et jamais de soi.
"- Docteur, ça ne va pas du tout. Mon mari fait la cuisine, mais il n'écoute rien de ce que je lui dis. Il n'en fait qu'à sa tête. Pourtant je lui dis comment faire. Moi je sais. Mais il veut pas m'entendre. Il me rend folle à ne rien faire comme je le veux.
- Donc ce qui ne va pas c'est que votre mari (de 83 ans) ne vous obéit pas ?
- Non. Enfin oui. Enfin... ce serait tellement plus simple s'il faisait ce que je lui dis"
Le bonheur, c'est uniquement l'autre qui peut l'apporter, si j'écoute cette patiente. Ou plus exactement, le bonheur, c'est quand le monde tourne comme "Je" l'a décidé. "Je" est donc heureux en dictant la conduite des autres.
Le bonheur de "Je" est une dictature.
"Quand JE et MOI sont dans un bateau, JE rame, et c'est MOI qui tombe à l'eau. Quant au boulot, pendant que JE, l'affreux, n'en fout pas une rame, moi, besogneux, ne bosse que pour ses impôts." (Je et Moi, Michel Fugain)
On pourrait multiplier les exemples à l'envi. Cette attente contemplative d'un évènement extérieur qui amènerait ce bonheur "parce que j'y ai droit".
J'ai un peu l'impression qu'à ce jeu là, on peut attendre longtemps. Toute une vie même.
"I was an impossible case, no-one ever could reach me. But I think I can see in your face there's a lot you can teach me. So I wanna know, what's the name of the game ? Does it mean anything to you ?" (The name of the game, ABBA)
(J'étais dans une situation impossible, personne ne pouvait m'atteindre. Mais je pense que je peux voir sur ton visage que tu peux m'apprendre beaucoup. Alors j'aimerais connaître le nom de ce jeu ? Est-ce que ça te dit quelque chose ?)
S'ouvrir aux autres. Partir du principe que le bonheur vient de l'autre par ce qu'il peut nous apporter et pas ce qu'on attend de lui.
Jouer le jeu du bonheur, sans exiger rien de personne, et juste prendre les choses comme elles viennent.
Le bonheur qu'on décrète plutôt que celui qu'on subit.
Bon... on frôle la bisounourserie quand même ?
Une amie a cité récemment dans un autre contexte le discours inaugural de Kennedy "ne vous demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, mais demandez-vous ce que vous pouvez faire pour votre pays". Adapté à la recherche du bonheur, je dirais : n'attendez pas qu'on vous apporte le bonheur, mais œuvrez en permanence pour le créer.
Il y a une forme d'égoïsme dans le bonheur ?
"Qu´est-ce qui les fait sourire encore, ces gosses des rues, toujours dehors, entre la peur et la loi du plus fort ? Est-ce qu´ils sourient pour la photo, ou parce que pour sauver sa peau, les autres et la misère, c´est déjà trop?" (Ne m'oublie pas, Michel Fugain)
On pourrait se dire que le bonheur dépend des conditions matérielles. Le bonheur, c'est vivre dans des draps de soie, en partant en vacance sur un yacht au milieu d'eaux bleu turquoises.
J'exerce dans une ville du nord, dans un quartier pas forcément très favorisé. Ce qu'on appelle le "niveau social" en terme de richesses n'est pas très important.
Et pourtant je ne soigne pas des patients tristes. Certains sont même des mines de bonheur à ciel ouvert.
"Il en faut peu pour être heureux, vraiment très peu pour être heureux. Il faut se satisfaire du nécessaire : un peu d'eau fraîche et de verdure que nous prodigue la nature, quelques rayons de miel et de soleil" (Le livre de la jungle)
Je me dis parfois que les dictateurs de bonheur, jamais satisfaits de ce que les autres peuvent apporter, devraient peut-être aller faire un tour dans des pays très défavorisés et voir à quel point les enfants peuvent tout de même être heureux.
Je me dis aussi qu'un jour, je devrais y faire un tour moi-même, pour apprendre à relativiser les fois où je ne suis pas content, où je me plains de telle ou telle chose. Pour voir que le bonheur, c'est de vivre, avant tout.
Mais être heureux, ça s'apprend ?
"T'es du parti des perdants, consciemment, viscéralement. Et tu regardes en bas, mais tu tomberas pas tant qu'on aura besoin de toi. Et tu prends les bonheurs comme grains de raisin, petits bouts de petits riens" (Famille, Jean-Jacques Goldman)
On peut ne pas avoir une forte confiance en soi et pourtant prendre la vie comme elle vient.
J'ai fait ce choix.
Je ne brille pas par ma confiance en moi, je pense que je me pose beaucoup (trop) de questions en permanence, mais j'aime me dire que le bonheur réside dans de petites choses.
Faire plaisir à mes zèbres.
Appeler ma femme sur la route, même si je serai là dans moins de 5 minutes.
Passer une après-midi à jouer au Time's up.
Aller rencontrer des twittos dans la vraie vie et parler tranquillement comme si nous nous étions toujours connus.
Lire les billets, les blogs, les merveilleux livres de ces mêmes twittos-amis. Etre fier de les connaître, comme on peut être fier de connaître de belles personnes.
Ca ne m'empêche pas de râler, bougonner, bien sûr. Je suis humain.
"J'ai décidé d'être heureux parce c'est bon pour la santé" disait Voltaire.
Nous avons placé cette phrase en grand dans la maison pour y penser tous les jours.
Peu importe les évènements que la vie peut nous réserver, bons ou mauvais, car il y aura forcément les deux, on peut tenter d'être heureux si on le veut.
"Look at me standing here on my own again up straight in the sunshine. No need to run and hide, it's a wonderful wonderful life. No need to laugh and cry it's a wonderful wonderful life" (Wonderful life, Black)
(Regardez-moi ici encore, debout sous le soleil. Pas besoin de courir ou de se cacher, c'est une vie merveilleuse. Pas besoin de rire ou de crier, c'est une vie merveilleuse)
Chaque jour suffit sa peine.
Chaque jour porte aussi son lot de bonheur. Si "Je" veux.
(Une fille heureuse, un garçon heureux, un fils heureux, un ami heureux vivant tous dans un monde heureux, vivant tous dans un monde seul)
Ce billet me démange depuis un moment.C'est quoi le bonheur ? Qu'est-ce qui nous rend heureux ?
Je lis régulièrement sur les réseaux sociaux ou ailleurs des messages ou des billets très inquisiteurs sur le bonheur. Un peu dans l'idée de "C'est quand le bonheur" de Cali.
Comme si le bonheur ne dépendait que des autres, et jamais de soi.
"- Docteur, ça ne va pas du tout. Mon mari fait la cuisine, mais il n'écoute rien de ce que je lui dis. Il n'en fait qu'à sa tête. Pourtant je lui dis comment faire. Moi je sais. Mais il veut pas m'entendre. Il me rend folle à ne rien faire comme je le veux.
- Donc ce qui ne va pas c'est que votre mari (de 83 ans) ne vous obéit pas ?
- Non. Enfin oui. Enfin... ce serait tellement plus simple s'il faisait ce que je lui dis"
Le bonheur, c'est uniquement l'autre qui peut l'apporter, si j'écoute cette patiente. Ou plus exactement, le bonheur, c'est quand le monde tourne comme "Je" l'a décidé. "Je" est donc heureux en dictant la conduite des autres.
Le bonheur de "Je" est une dictature.
"Quand JE et MOI sont dans un bateau, JE rame, et c'est MOI qui tombe à l'eau. Quant au boulot, pendant que JE, l'affreux, n'en fout pas une rame, moi, besogneux, ne bosse que pour ses impôts." (Je et Moi, Michel Fugain)
On pourrait multiplier les exemples à l'envi. Cette attente contemplative d'un évènement extérieur qui amènerait ce bonheur "parce que j'y ai droit".
J'ai un peu l'impression qu'à ce jeu là, on peut attendre longtemps. Toute une vie même.
"I was an impossible case, no-one ever could reach me. But I think I can see in your face there's a lot you can teach me. So I wanna know, what's the name of the game ? Does it mean anything to you ?" (The name of the game, ABBA)
(J'étais dans une situation impossible, personne ne pouvait m'atteindre. Mais je pense que je peux voir sur ton visage que tu peux m'apprendre beaucoup. Alors j'aimerais connaître le nom de ce jeu ? Est-ce que ça te dit quelque chose ?)
S'ouvrir aux autres. Partir du principe que le bonheur vient de l'autre par ce qu'il peut nous apporter et pas ce qu'on attend de lui.
Jouer le jeu du bonheur, sans exiger rien de personne, et juste prendre les choses comme elles viennent.
Le bonheur qu'on décrète plutôt que celui qu'on subit.
Bon... on frôle la bisounourserie quand même ?
Une amie a cité récemment dans un autre contexte le discours inaugural de Kennedy "ne vous demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, mais demandez-vous ce que vous pouvez faire pour votre pays". Adapté à la recherche du bonheur, je dirais : n'attendez pas qu'on vous apporte le bonheur, mais œuvrez en permanence pour le créer.
Il y a une forme d'égoïsme dans le bonheur ?
"Qu´est-ce qui les fait sourire encore, ces gosses des rues, toujours dehors, entre la peur et la loi du plus fort ? Est-ce qu´ils sourient pour la photo, ou parce que pour sauver sa peau, les autres et la misère, c´est déjà trop?" (Ne m'oublie pas, Michel Fugain)
On pourrait se dire que le bonheur dépend des conditions matérielles. Le bonheur, c'est vivre dans des draps de soie, en partant en vacance sur un yacht au milieu d'eaux bleu turquoises.
J'exerce dans une ville du nord, dans un quartier pas forcément très favorisé. Ce qu'on appelle le "niveau social" en terme de richesses n'est pas très important.
Et pourtant je ne soigne pas des patients tristes. Certains sont même des mines de bonheur à ciel ouvert.
"Il en faut peu pour être heureux, vraiment très peu pour être heureux. Il faut se satisfaire du nécessaire : un peu d'eau fraîche et de verdure que nous prodigue la nature, quelques rayons de miel et de soleil" (Le livre de la jungle)
Je me dis parfois que les dictateurs de bonheur, jamais satisfaits de ce que les autres peuvent apporter, devraient peut-être aller faire un tour dans des pays très défavorisés et voir à quel point les enfants peuvent tout de même être heureux.
Je me dis aussi qu'un jour, je devrais y faire un tour moi-même, pour apprendre à relativiser les fois où je ne suis pas content, où je me plains de telle ou telle chose. Pour voir que le bonheur, c'est de vivre, avant tout.
Mais être heureux, ça s'apprend ?
"T'es du parti des perdants, consciemment, viscéralement. Et tu regardes en bas, mais tu tomberas pas tant qu'on aura besoin de toi. Et tu prends les bonheurs comme grains de raisin, petits bouts de petits riens" (Famille, Jean-Jacques Goldman)
On peut ne pas avoir une forte confiance en soi et pourtant prendre la vie comme elle vient.
J'ai fait ce choix.
Je ne brille pas par ma confiance en moi, je pense que je me pose beaucoup (trop) de questions en permanence, mais j'aime me dire que le bonheur réside dans de petites choses.
Faire plaisir à mes zèbres.
Appeler ma femme sur la route, même si je serai là dans moins de 5 minutes.
Passer une après-midi à jouer au Time's up.
Aller rencontrer des twittos dans la vraie vie et parler tranquillement comme si nous nous étions toujours connus.
Lire les billets, les blogs, les merveilleux livres de ces mêmes twittos-amis. Etre fier de les connaître, comme on peut être fier de connaître de belles personnes.
Ca ne m'empêche pas de râler, bougonner, bien sûr. Je suis humain.
"J'ai décidé d'être heureux parce c'est bon pour la santé" disait Voltaire.
Nous avons placé cette phrase en grand dans la maison pour y penser tous les jours.
Peu importe les évènements que la vie peut nous réserver, bons ou mauvais, car il y aura forcément les deux, on peut tenter d'être heureux si on le veut.
"Look at me standing here on my own again up straight in the sunshine. No need to run and hide, it's a wonderful wonderful life. No need to laugh and cry it's a wonderful wonderful life" (Wonderful life, Black)
(Regardez-moi ici encore, debout sous le soleil. Pas besoin de courir ou de se cacher, c'est une vie merveilleuse. Pas besoin de rire ou de crier, c'est une vie merveilleuse)
Chaque jour suffit sa peine.
Chaque jour porte aussi son lot de bonheur. Si "Je" veux.
dimanche 23 mars 2014
Carpe diem
"Il y a plein d´enfants qui se roulent sur la pelouse, il y a plein de chiens. Il y a même un chat, une tortue, des poissons rouges, il ne manque rien.
On dirait le Sud, le temps dure longtemps et la vie sûrement plus d´un million d´années. Et toujours en été.
Un jour ou l´autre il faudra qu´il y ait la guerre, on le sait bien. On n´aime pas ça, mais on ne sait pas quoi faire, on dit c´est le destin" (Le sud, Nino Ferrer)
Il y a quelques jours, mon zèbre m'a demandé d'enregistrer le documentaire "Apocalypse" sur France 2.
Il doivent le regarder à l'école en principe.
Ca tombe bien, je n'ai pas eu le temps de le regarder au moment de sa diffusion, et j'aurai la possibilité d'y jeter un œil aussi.
J'ai donc enregistré le programme sur l'ordinateur et l'ai ensuite converti en format DVD.
Soit. Je ne vais pas faire un billet sur "comment convertir un fichier wtv en DVD", rassurez-vous.
C'est juste qu'en vérifiant si la gravure avait fonctionné, je suis tombé sur des images qui m'ont fait l'effet d'une sacré claque.
On y voyait un enfant, une petite fille de 5 ou 6 ans, jouant à la plage, avec le sable et les vagues.
Sorties du contexte, ces images pourraient donner lieu d'images d'archives sur les années 30, la façon de vivre, les vacances. Quasiment une valeur ethnologique finalement.
Sauf que le titre du documentaire était "Apocalypse".
Cette fillette jouait, insouciante comme toutes les fillettes de 6 ans. Comme ma petite zébrette.
"Elle allait à l'école au village d'en bas. Elle apprenait les livres elle apprenait les lois. Elle chantait les grenouilles et les princesses qui dorment au bois. Elle aimait sa poupée elle aimait ses amis, surtout Ruth et Anna et surtout Jérémie, et ils se marieraient un jour peut-être à Varsovie.
Comme toi [...] Comme toi que je regarde tout bas. Comme toi qui dort en rêvant à quoi ?
Comme toi [...]
Elle s'appelait Sarah, elle n'avait pas huit ans, sa vie c'était douceur rêves et nuages blancs, mais d'autres gens en avaient décidé autrement. Elle avait tes yeux clairs et elle avait ton âge, c'était une petite fille sans histoire et très sage, mais elle n'est pas née comme toi ici et maintenant" (Comme toi, Jean-Jacques Goldman)
Même si cette chanson a été écrite en rapport à la deuxième guerre mondiale, je n'ai pu m'empêcher de l'entendre résonner dans ma tête immédiatement.
D'autant plus que cette première apocalypse n'a pas été suffisante et qu'elle a donné lieu à cette deuxième là.
Tous ces enfants insouciants, jouant sans imaginer la suite de leur vie. Sans imaginer que certains ne reverraient jamais leur père, leur mère, leurs proches à cause de ces guerres...
Je n'ai pas envie de me la jouer Miss France, j'aimerais qu'il n'y ait plus de guerre dans le monde, mais les évènements ne semblent pas prendre ce chemin.
Je suis habituellement d'un naturel optimiste, mais je ne peux m'empêcher d'y penser de plus en plus.
Nous avons la chance d'être nés dans un pays en paix, et d'être libres.
"J´avais oublié l´ironie de notre histoire. J´avais oublié qu´on a si peu de mémoire. Combien de larmes, combien de haines, combien de hontes, combien de murs se cachent derrière un mur qui tombe?
Est-ce que c´est moi qui deviens fou? Répondez-moi, mes yeux sont flous. Au nom de qui fait-on le choix de l´innocence? Au nom d´ quelle liberté, de quelle transparence ?" (Combien de murs, Patrick Bruel)
J'ai un pincement au cœur, je vois la vie par mes yeux d'adulte et de père. Saura-t-on éviter un troisième opus ? Puis-je dormir en me disant que l'optimisme reste de mise et qu'il faut faire confiance en l'humain ?
J'aimerais me dire que les nouvelles technologies de l'information permettront d'éviter le pire, que la propagande sera rapidement mise à mal et que les peuples se parleront.
J'aimerais que le "plus jamais ça" soit vraiment dit et entendu.
La vie est trop courte pour penser la raccourcir encore, non ?
"In Europe and America, there's a growing feeling of hysteria. Conditioned to respond to all the threats in the rhetorical speeches of the Soviets. [...] We share the same biology regardless of ideology. What might save us, me, and you is if the Russians love their children too" (Russians, Sting)
(En Europe et en Amérique, un sentiment d'hystérie grandit. Conditionnés à répondre à toutes les menaces de la rhétorique des discours des Soviétiques. Nous partageons la même biologie, quelle que soit l'idéologie. Ce qui pourrait nous sauver vous et moi, c'est que les Russes aiment aussi leurs enfants)
En attendant, je vais continuer à sourire.
Zébrette me parle de princesses en souriant et en riant.
L'insouciance se cultive, je pense. Comme le père dans le film "La vie est belle".
Carpe diem.
On dirait le Sud, le temps dure longtemps et la vie sûrement plus d´un million d´années. Et toujours en été.
Un jour ou l´autre il faudra qu´il y ait la guerre, on le sait bien. On n´aime pas ça, mais on ne sait pas quoi faire, on dit c´est le destin" (Le sud, Nino Ferrer)
Il y a quelques jours, mon zèbre m'a demandé d'enregistrer le documentaire "Apocalypse" sur France 2.
Il doivent le regarder à l'école en principe.
Ca tombe bien, je n'ai pas eu le temps de le regarder au moment de sa diffusion, et j'aurai la possibilité d'y jeter un œil aussi.
J'ai donc enregistré le programme sur l'ordinateur et l'ai ensuite converti en format DVD.
Soit. Je ne vais pas faire un billet sur "comment convertir un fichier wtv en DVD", rassurez-vous.
C'est juste qu'en vérifiant si la gravure avait fonctionné, je suis tombé sur des images qui m'ont fait l'effet d'une sacré claque.
On y voyait un enfant, une petite fille de 5 ou 6 ans, jouant à la plage, avec le sable et les vagues.
Sorties du contexte, ces images pourraient donner lieu d'images d'archives sur les années 30, la façon de vivre, les vacances. Quasiment une valeur ethnologique finalement.
Sauf que le titre du documentaire était "Apocalypse".
Cette fillette jouait, insouciante comme toutes les fillettes de 6 ans. Comme ma petite zébrette.
"Elle allait à l'école au village d'en bas. Elle apprenait les livres elle apprenait les lois. Elle chantait les grenouilles et les princesses qui dorment au bois. Elle aimait sa poupée elle aimait ses amis, surtout Ruth et Anna et surtout Jérémie, et ils se marieraient un jour peut-être à Varsovie.
Comme toi [...] Comme toi que je regarde tout bas. Comme toi qui dort en rêvant à quoi ?
Comme toi [...]
Elle s'appelait Sarah, elle n'avait pas huit ans, sa vie c'était douceur rêves et nuages blancs, mais d'autres gens en avaient décidé autrement. Elle avait tes yeux clairs et elle avait ton âge, c'était une petite fille sans histoire et très sage, mais elle n'est pas née comme toi ici et maintenant" (Comme toi, Jean-Jacques Goldman)
Même si cette chanson a été écrite en rapport à la deuxième guerre mondiale, je n'ai pu m'empêcher de l'entendre résonner dans ma tête immédiatement.
D'autant plus que cette première apocalypse n'a pas été suffisante et qu'elle a donné lieu à cette deuxième là.
Tous ces enfants insouciants, jouant sans imaginer la suite de leur vie. Sans imaginer que certains ne reverraient jamais leur père, leur mère, leurs proches à cause de ces guerres...
Je n'ai pas envie de me la jouer Miss France, j'aimerais qu'il n'y ait plus de guerre dans le monde, mais les évènements ne semblent pas prendre ce chemin.
Je suis habituellement d'un naturel optimiste, mais je ne peux m'empêcher d'y penser de plus en plus.
Nous avons la chance d'être nés dans un pays en paix, et d'être libres.
"J´avais oublié l´ironie de notre histoire. J´avais oublié qu´on a si peu de mémoire. Combien de larmes, combien de haines, combien de hontes, combien de murs se cachent derrière un mur qui tombe?
Est-ce que c´est moi qui deviens fou? Répondez-moi, mes yeux sont flous. Au nom de qui fait-on le choix de l´innocence? Au nom d´ quelle liberté, de quelle transparence ?" (Combien de murs, Patrick Bruel)
J'ai un pincement au cœur, je vois la vie par mes yeux d'adulte et de père. Saura-t-on éviter un troisième opus ? Puis-je dormir en me disant que l'optimisme reste de mise et qu'il faut faire confiance en l'humain ?
J'aimerais me dire que les nouvelles technologies de l'information permettront d'éviter le pire, que la propagande sera rapidement mise à mal et que les peuples se parleront.
J'aimerais que le "plus jamais ça" soit vraiment dit et entendu.
La vie est trop courte pour penser la raccourcir encore, non ?
"In Europe and America, there's a growing feeling of hysteria. Conditioned to respond to all the threats in the rhetorical speeches of the Soviets. [...] We share the same biology regardless of ideology. What might save us, me, and you is if the Russians love their children too" (Russians, Sting)
(En Europe et en Amérique, un sentiment d'hystérie grandit. Conditionnés à répondre à toutes les menaces de la rhétorique des discours des Soviétiques. Nous partageons la même biologie, quelle que soit l'idéologie. Ce qui pourrait nous sauver vous et moi, c'est que les Russes aiment aussi leurs enfants)
En attendant, je vais continuer à sourire.
Zébrette me parle de princesses en souriant et en riant.
L'insouciance se cultive, je pense. Comme le père dans le film "La vie est belle".
Carpe diem.
vendredi 14 mars 2014
Carrément méchant, jamais content
"Sur le fil de ma vie je me perds parfois. A chercher l'équilibre, je tombe. Mes envies font toujours ce qu'elles veulent de moi, et tant pis si demain tout retombe" (Sur le fil, Jenifer)
Bon, d'accord, comme entrée en matière pour un billet de blog, citer du Jenifer, c'est comme un médecin qui puiserait ses connaissances dans Doctissimo...
Ma dernière zébrette avait allumé son lecteur mp3 antichoc (investissement incroyablement rentabilisé tellement elle l'écoute) et cette chanson emplissait la maison de façon ma foifort sympathique habituelle.
Mes envies font ce qu'elles veulent de moi...
De quoi ai-je envie ?
De tout. De rien.
Un jour de soulever des montagnes. Le lendemain de repasser en stade larvaire et procrastinateur.
Parfois, je sais de quoi j'ai envie. Parfois pas du tout.
Et c'est régulièrement déstabilisant cette indécision.
Acheter des yaourts au supermarché, c'est presque un parcours du combattant : quel parfum ? quelle texture ? avec morceaux ? sans ?
Et si je me décide (enfin dirait ma chère et tendre) il m'arrive a posteriori de me dire "ah mais j'aurais peut être dû choisir l'autre finalement".
"Faudrait savoir ce que tu veux, Faudrait savoir ce que tu veux,
C est comme ça qu'est-ce que j y peux, C est comme ça qu'est-ce que j y peux
Après tout qu'est-ce que j'y peux" (Double jeu, Christophe Willem)
Si je ne sais pas ce que je veux, est-ce parce que je ne sais pas qui je suis ?
Parce que si je savais, de A à Z, je saurais me déciderpour mes yaourts à chaque moment important de ma vie, non ?
Donc, je ne sais pas qui je suis. Mais qui le sait alors ?
Ma femme et mes 3 zèbres ? Oui, je pense qu'ils me connaissent plutôt pas mal. Je me vois dans leurs yeux et je comprends par leurs réactions comment je fonctionne aussi.
Ils sont ma bouffée d'oxygène, un des pieds de mon trépied.
Les amis aussi permettent de mieux se connaître.
Je distingue volontiers les connaissances des amis. Les amis sont là dans les bons moments comme dans les mauvais, et vous pouvez ne pas vous voir pendant des semaines, voire des mois, et reprendre une discussion là où elle s'était arrêtée comme si le temps n'avait eu aucune prise.
Le temps laisse par contre une empreinte sur les connaissances, qui nous amène à parler de la pluie, du beau temps... et ne plus avoir grand chose d'autre à échanger.
Pour moi qui allie doute et manque de confiance en soi, les relations sociales jouent un rôle de miroir. Pas dans le sens narcissique de la sorcière dans Blanche-Neige "Miroir, mon beau miroir, dis-moi que je suis le plus beau", mais plutôt pour montrer un reflet de soi avec un commentaire "Mais regarde-toi un peu, t'as pas à rougir de toi".
Mention toute spéciale à mes amis twittos et assimilés : un miroir inattendu et enrichissant. Je suis moi, on ne parle pas de la pluie et du beau temps... on se retrouve de temps en temps dans la vraie vie et nous poursuivons nos discussions.
Et même si Christian me renvoie une image Dexterienne qui me fait rire, j'espère bien le rencontrer un jour prochain...
"Un jour c´est oui, un jour c´est non. Un jour c´est d´accord, un jour c´est hmm pas question! Un jour c´est oui, un jour c´est non. Un jour sur deux, t´es adorable, un jour sur deux, t´es invivable" (Un jour c'est oui, un jour c'est non, Thierry Hazard)
Ce qui me rassure, c'est que les patients, en général, ont l'air d'être soumis aux mêmes doutes et aux mêmes interrogations.
BREAKING NEWS !
Je suis donc un être humain "normal"
J'essaye de tenir compte de cela quand je leur parle. Un patient diabétique faisant très attention à la seule chose qui prolongera durablement sa vie (et non, ce ne sont pas les médicaments, mais bien son alimentation et son hygiène de vie) va parfois perdre sa motivation, faire des "écarts" ou des excès.
Et heureusement !
La vie n'est pas une ligne droite. Elle est remplie de courbes. Le but à atteindre est fixé, mais les chemins pour y parvenir sont multiples et sinueux. Mais il faut garder en tête l'objectif.
"Tenter, sans force et sans armure, d'atteindre l'inaccessible étoile. Telle est ma quête, suivre l'étoile" (La quête, Jacques Brel) *Spéciale dédicace à l'un de mes associés
Comprendre que le patient peut parfois être aussi perdu que je peux l'être, et jouer le rôle de miroir.
Les communicants appellent ça le renforcement positif. Montrer aux patients qu'il vaut mieux une somme de petites victoires au quotidien qu'une seule écrasante et éphémère conquête.
C'est passionnant cette partie du métier : la relation aux autres.
Et parfois, c'est usant et démotivant.
Un jour, on a l'impression d'avoir été utile et d'être envahi par un sentiment de fierté du (bon) travail accompli.
Parfois on a l'impression de tout faire de travers, même en y mettant tout son cœur.
Très rarement, je me dis que je devrais arrêter la "part soin" du métier. Faire des statistiques, de la pédagogie...
Très souvent, je me dis que la part soin est tellement enrichissante que pour rien au monde je ne l'abandonnerai.
A chercher l'équilibre, je tombe. Oui, finalement, les paroles de la chanson qu'écoute zébrette me correspondent. Je vais l'écouter encore un petit peu...
Ah ? Mais ? Pourquoi l'a-t-elle arrêtée en plein milieu ?
Quoi ? Jouer à un jeu de société avec elle ? Mais il y a cinq minutes elle voulait dessiner en écoutant de la musique !
Il faudrait qu'elle sache ce qu'elle veut de temps en temps, non ?
Bon, d'accord, comme entrée en matière pour un billet de blog, citer du Jenifer, c'est comme un médecin qui puiserait ses connaissances dans Doctissimo...
Ma dernière zébrette avait allumé son lecteur mp3 antichoc (investissement incroyablement rentabilisé tellement elle l'écoute) et cette chanson emplissait la maison de façon ma foi
Mes envies font ce qu'elles veulent de moi...
De quoi ai-je envie ?
De tout. De rien.
Un jour de soulever des montagnes. Le lendemain de repasser en stade larvaire et procrastinateur.
Parfois, je sais de quoi j'ai envie. Parfois pas du tout.
Et c'est régulièrement déstabilisant cette indécision.
Acheter des yaourts au supermarché, c'est presque un parcours du combattant : quel parfum ? quelle texture ? avec morceaux ? sans ?
Et si je me décide (enfin dirait ma chère et tendre) il m'arrive a posteriori de me dire "ah mais j'aurais peut être dû choisir l'autre finalement".
"Faudrait savoir ce que tu veux, Faudrait savoir ce que tu veux,
C est comme ça qu'est-ce que j y peux, C est comme ça qu'est-ce que j y peux
Après tout qu'est-ce que j'y peux" (Double jeu, Christophe Willem)
Si je ne sais pas ce que je veux, est-ce parce que je ne sais pas qui je suis ?
Parce que si je savais, de A à Z, je saurais me décider
Donc, je ne sais pas qui je suis. Mais qui le sait alors ?
Ma femme et mes 3 zèbres ? Oui, je pense qu'ils me connaissent plutôt pas mal. Je me vois dans leurs yeux et je comprends par leurs réactions comment je fonctionne aussi.
Ils sont ma bouffée d'oxygène, un des pieds de mon trépied.
Les amis aussi permettent de mieux se connaître.
Je distingue volontiers les connaissances des amis. Les amis sont là dans les bons moments comme dans les mauvais, et vous pouvez ne pas vous voir pendant des semaines, voire des mois, et reprendre une discussion là où elle s'était arrêtée comme si le temps n'avait eu aucune prise.
Le temps laisse par contre une empreinte sur les connaissances, qui nous amène à parler de la pluie, du beau temps... et ne plus avoir grand chose d'autre à échanger.
Pour moi qui allie doute et manque de confiance en soi, les relations sociales jouent un rôle de miroir. Pas dans le sens narcissique de la sorcière dans Blanche-Neige "Miroir, mon beau miroir, dis-moi que je suis le plus beau", mais plutôt pour montrer un reflet de soi avec un commentaire "Mais regarde-toi un peu, t'as pas à rougir de toi".
Mention toute spéciale à mes amis twittos et assimilés : un miroir inattendu et enrichissant. Je suis moi, on ne parle pas de la pluie et du beau temps... on se retrouve de temps en temps dans la vraie vie et nous poursuivons nos discussions.
Et même si Christian me renvoie une image Dexterienne qui me fait rire, j'espère bien le rencontrer un jour prochain...
"Un jour c´est oui, un jour c´est non. Un jour c´est d´accord, un jour c´est hmm pas question! Un jour c´est oui, un jour c´est non. Un jour sur deux, t´es adorable, un jour sur deux, t´es invivable" (Un jour c'est oui, un jour c'est non, Thierry Hazard)
Ce qui me rassure, c'est que les patients, en général, ont l'air d'être soumis aux mêmes doutes et aux mêmes interrogations.
BREAKING NEWS !
Je suis donc un être humain "normal"
J'essaye de tenir compte de cela quand je leur parle. Un patient diabétique faisant très attention à la seule chose qui prolongera durablement sa vie (et non, ce ne sont pas les médicaments, mais bien son alimentation et son hygiène de vie) va parfois perdre sa motivation, faire des "écarts" ou des excès.
Et heureusement !
La vie n'est pas une ligne droite. Elle est remplie de courbes. Le but à atteindre est fixé, mais les chemins pour y parvenir sont multiples et sinueux. Mais il faut garder en tête l'objectif.
"Tenter, sans force et sans armure, d'atteindre l'inaccessible étoile. Telle est ma quête, suivre l'étoile" (La quête, Jacques Brel) *Spéciale dédicace à l'un de mes associés
Comprendre que le patient peut parfois être aussi perdu que je peux l'être, et jouer le rôle de miroir.
Les communicants appellent ça le renforcement positif. Montrer aux patients qu'il vaut mieux une somme de petites victoires au quotidien qu'une seule écrasante et éphémère conquête.
C'est passionnant cette partie du métier : la relation aux autres.
Et parfois, c'est usant et démotivant.
Un jour, on a l'impression d'avoir été utile et d'être envahi par un sentiment de fierté du (bon) travail accompli.
Parfois on a l'impression de tout faire de travers, même en y mettant tout son cœur.
Très rarement, je me dis que je devrais arrêter la "part soin" du métier. Faire des statistiques, de la pédagogie...
Très souvent, je me dis que la part soin est tellement enrichissante que pour rien au monde je ne l'abandonnerai.
A chercher l'équilibre, je tombe. Oui, finalement, les paroles de la chanson qu'écoute zébrette me correspondent. Je vais l'écouter encore un petit peu...
Ah ? Mais ? Pourquoi l'a-t-elle arrêtée en plein milieu ?
Quoi ? Jouer à un jeu de société avec elle ? Mais il y a cinq minutes elle voulait dessiner en écoutant de la musique !
Il faudrait qu'elle sache ce qu'elle veut de temps en temps, non ?
dimanche 26 janvier 2014
Quand on est con...
"Le temps ne fait rien à l'affaire. Quand on est con, on est con ! Qu'on ait 20 ans, qu'on soit grand père. Quand on est con, on est con !" (Quand on est con, Georges Brassens)
On le devient ou on l'est d'emblée ?
Il paraît qu'on est toujours le con de quelqu'un. Je veux bien le croire. Même si je trouve ça un peu con, justement.
J'espère ne pas être votre con, vous qui lisez ces lignes. En même temps, être con, c'est exister. C'est mieux que l'indifférence, non ?
Pourtant... Pas mal de messages circulent ça et là en ce moment, les anti "mariage pour tous", les anti IVG, les anti (inscrivez ici ce que vous voulez) ... qui stigmatisent une partie de la population et tentent le clivage des uns contre les autres.
"On danse, les uns contre les autres. On court, les uns après les autres. On se déteste, on se déchire, on se détruit, on se désire. Mais au bout du compte on se rend compte qu'on est toujours tout seul au monde" (Les uns contre les autres, Starmania)
Au final, la fameuse fraternité inscrite sur nos bâtiments publics, la tolérance qui devrait être la nôtre partout et en tout temps pour accepter l'autre dans sa différence... elles sont où ?
Sommes-nous condamnés à être de grands égoïstes vivant en société ?
Nos dirigeants politiques entretiennent-ils parfois cet égoïsme à des fins purement politiciennes ?
"L'essentiel à nous apprendre, c'est l'amour des livres qui fait qu'tu peux voyager d'ta chambre autour de l'humanité, c'est l'amour de ton prochain, même si c'est un beau salaud. La haine ça n'apporte rien, pis elle viendra bien assez tôt" (C'est quand qu'on va où ? , Renaud)
Oui, bon, on va encore me taxer de bisounourserie, mais franchement, si on y mettait juste un peu du nôtre, la vie serait tellement plus facile.
Suffirait juste de le vouloir. Un peu.
Parce que les enfants, eux, sont souvent plus tolérants que nous ne le sommes. Alors, on devient quand intolérant ?
Il y a un jour précis ? C'est comme les dates sur les yaourts, tu deviens non recommandable du jour au lendemain ? Ou, toujours comme les yaourts, même si tu dépasses un peu la date, on peut encore te côtoyer sans risque ?
"Nous avons été les bourreaux de Luther King, d’Atahualpa, Copernic et Galileo. Nous sommes les fils d’Attila. Pourquoi l’homme est-il donc un loup ? Cinq siècles et plus de barbarie... En aurons-nous un jour assez du sang des larmes et des cris ?" (Nous sommes ce que nous sommes, Dracula (avec Bruno Pelletier))
Quand devenons-nous vraiment nous-mêmes ?
Parce qu'à bien y réfléchir, je peux me souvenir du jour où j'ai décidé d'être médecin. Avant même de m'inscrire à l'université. J'avais décidé que je ferais ça comme métier. J'ai travaillé, j'ai eu mon concours, pas du premier coup, mais j'ai continué à travailler... Et j'ai passé toutes les autres années.
Mais quand suis-je devenu médecin ?
Quand j'ai vu mon premier patient ?
Quand j'ai pris en charge seul mon premier patient ?
Quand j'ai vu mon premier décès ?
Quand je me suis senti un peu responsable de mon premier ?
Quand je me suis installé ?
Quand j'ai eu un an d'installation ? Deux ?
Je suis l'heureux père de trois zèbres qui grandissent beaucoup trop vite à mon goût...
Mais je suis devenu père quand ?
Quand nous avons décidé d'avoir notre premier enfant ?
Quand nous venions tout juste de le faire ?
Quand la première zébrette est née ?
Au bout d'un mois ? Deux ?
Je pensais être politiquement de droite, parce que je crois viscéralement à la valeur du travail et qu'on n'a rien sans rien dans la vie. Travailler dur, peu importe le métier, mais être fier du travail accompli, comme autant de pièces d'un édifice que serait notre société. Enlevez une pièce, et l'édifice s'effondre.
Et je me rends compte à écouter les ténors de droite que je ne partage aucune autre idéologie.
Je suis donc devenu plus de gauche ? Mais quand ?
Quand j'ai été confronté à la détresse sociale de certains patients ?
Quand j'ai rejoint Twitter et que j'y ai lu les blogs humanistes et tolérants de beaucoup ?
Quand j'ai cessé de me regarder le nombril ?
Quand j'ai commencé à discuter avec un représentant politique ? Deux ?
J'essaye parfois d'arrondir les angles entre certains, dans la vraie vie ou sur les réseaux sociaux. De prôner un "aimez-vous les uns les autres" que mon enfance m'a appris.
Parfois ça marche. Parfois j'ai l'impression de faire pire que mieux.
Quand arrêterai-je ?
Quand ça ne marchera plus du tout ?
Quand on m'aura dit que je suis un vieux con à toujours vouloir arrondir les angles ?
Quand je me serai emporté en râlant devant l'immobilisme de certaines situations ?
Quand j'aurai "perdu" un ami ? Deux ?
"It's as if I'm scared. It's as if I'm terrified. It's as if I'm scared. It's as if I'm playing with fire. Scared. It's as if I'm terrified. Are you scared? Are we playing with fire?" (Relax, Mika)
(C'est comme si j'avais peur. Comme si j'étais terrifié. Comme si j'avais peur. Comme si je jouais avec le feu. Peur. Comme si j'étais terrifié. As-tu peur ? Jouons-nous avec le feu ?)
Quand on prend une décision, comment sait-on qu'on prend la bonne ?
Quand on décide de choses qui paraissent insignifiantes et ont d'immenses répercussions ensuite, le sait-on ?
Si on ne le sait pas tout de suite, on le sait quand ? Quand il est trop tard ? Quand on en récolte les fruits ? Les fruits mûrs ? Les fruits pourris ?
Parce que l'enfer est pavé de bonnes intentions, que le pouvoir pervertit en général ?
Comment être sûr de soi sans être aveuglé ?
Quand on se trompe une fois ? Deux ?
Faut vraiment que j'arrête de me poser autant de questions..
Quand on se pose beaucoup (trop) de questions, on passe pour un con ?
On le devient ou on l'est d'emblée ?
Il paraît qu'on est toujours le con de quelqu'un. Je veux bien le croire. Même si je trouve ça un peu con, justement.
J'espère ne pas être votre con, vous qui lisez ces lignes. En même temps, être con, c'est exister. C'est mieux que l'indifférence, non ?
Pourtant... Pas mal de messages circulent ça et là en ce moment, les anti "mariage pour tous", les anti IVG, les anti (inscrivez ici ce que vous voulez) ... qui stigmatisent une partie de la population et tentent le clivage des uns contre les autres.
"On danse, les uns contre les autres. On court, les uns après les autres. On se déteste, on se déchire, on se détruit, on se désire. Mais au bout du compte on se rend compte qu'on est toujours tout seul au monde" (Les uns contre les autres, Starmania)
Au final, la fameuse fraternité inscrite sur nos bâtiments publics, la tolérance qui devrait être la nôtre partout et en tout temps pour accepter l'autre dans sa différence... elles sont où ?
Sommes-nous condamnés à être de grands égoïstes vivant en société ?
Nos dirigeants politiques entretiennent-ils parfois cet égoïsme à des fins purement politiciennes ?
"L'essentiel à nous apprendre, c'est l'amour des livres qui fait qu'tu peux voyager d'ta chambre autour de l'humanité, c'est l'amour de ton prochain, même si c'est un beau salaud. La haine ça n'apporte rien, pis elle viendra bien assez tôt" (C'est quand qu'on va où ? , Renaud)
Oui, bon, on va encore me taxer de bisounourserie, mais franchement, si on y mettait juste un peu du nôtre, la vie serait tellement plus facile.
Suffirait juste de le vouloir. Un peu.
Parce que les enfants, eux, sont souvent plus tolérants que nous ne le sommes. Alors, on devient quand intolérant ?
Il y a un jour précis ? C'est comme les dates sur les yaourts, tu deviens non recommandable du jour au lendemain ? Ou, toujours comme les yaourts, même si tu dépasses un peu la date, on peut encore te côtoyer sans risque ?
"Nous avons été les bourreaux de Luther King, d’Atahualpa, Copernic et Galileo. Nous sommes les fils d’Attila. Pourquoi l’homme est-il donc un loup ? Cinq siècles et plus de barbarie... En aurons-nous un jour assez du sang des larmes et des cris ?" (Nous sommes ce que nous sommes, Dracula (avec Bruno Pelletier))
Quand devenons-nous vraiment nous-mêmes ?
Parce qu'à bien y réfléchir, je peux me souvenir du jour où j'ai décidé d'être médecin. Avant même de m'inscrire à l'université. J'avais décidé que je ferais ça comme métier. J'ai travaillé, j'ai eu mon concours, pas du premier coup, mais j'ai continué à travailler... Et j'ai passé toutes les autres années.
Mais quand suis-je devenu médecin ?
Quand j'ai vu mon premier patient ?
Quand j'ai pris en charge seul mon premier patient ?
Quand j'ai vu mon premier décès ?
Quand je me suis senti un peu responsable de mon premier ?
Quand je me suis installé ?
Quand j'ai eu un an d'installation ? Deux ?
Je suis l'heureux père de trois zèbres qui grandissent beaucoup trop vite à mon goût...
Mais je suis devenu père quand ?
Quand nous avons décidé d'avoir notre premier enfant ?
Quand nous venions tout juste de le faire ?
Quand la première zébrette est née ?
Au bout d'un mois ? Deux ?
Je pensais être politiquement de droite, parce que je crois viscéralement à la valeur du travail et qu'on n'a rien sans rien dans la vie. Travailler dur, peu importe le métier, mais être fier du travail accompli, comme autant de pièces d'un édifice que serait notre société. Enlevez une pièce, et l'édifice s'effondre.
Et je me rends compte à écouter les ténors de droite que je ne partage aucune autre idéologie.
Je suis donc devenu plus de gauche ? Mais quand ?
Quand j'ai été confronté à la détresse sociale de certains patients ?
Quand j'ai rejoint Twitter et que j'y ai lu les blogs humanistes et tolérants de beaucoup ?
Quand j'ai cessé de me regarder le nombril ?
Quand j'ai commencé à discuter avec un représentant politique ? Deux ?
J'essaye parfois d'arrondir les angles entre certains, dans la vraie vie ou sur les réseaux sociaux. De prôner un "aimez-vous les uns les autres" que mon enfance m'a appris.
Parfois ça marche. Parfois j'ai l'impression de faire pire que mieux.
Quand arrêterai-je ?
Quand ça ne marchera plus du tout ?
Quand on m'aura dit que je suis un vieux con à toujours vouloir arrondir les angles ?
Quand je me serai emporté en râlant devant l'immobilisme de certaines situations ?
Quand j'aurai "perdu" un ami ? Deux ?
"It's as if I'm scared. It's as if I'm terrified. It's as if I'm scared. It's as if I'm playing with fire. Scared. It's as if I'm terrified. Are you scared? Are we playing with fire?" (Relax, Mika)
(C'est comme si j'avais peur. Comme si j'étais terrifié. Comme si j'avais peur. Comme si je jouais avec le feu. Peur. Comme si j'étais terrifié. As-tu peur ? Jouons-nous avec le feu ?)
Quand on prend une décision, comment sait-on qu'on prend la bonne ?
Quand on décide de choses qui paraissent insignifiantes et ont d'immenses répercussions ensuite, le sait-on ?
Si on ne le sait pas tout de suite, on le sait quand ? Quand il est trop tard ? Quand on en récolte les fruits ? Les fruits mûrs ? Les fruits pourris ?
Parce que l'enfer est pavé de bonnes intentions, que le pouvoir pervertit en général ?
Comment être sûr de soi sans être aveuglé ?
Quand on se trompe une fois ? Deux ?
Faut vraiment que j'arrête de me poser autant de questions..
Quand on se pose beaucoup (trop) de questions, on passe pour un con ?
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