"J'ai décidé d'être heureux parce que c'est bon pour la santé" (Voltaire)
Je pose souvent cette question à mes étudiants en stage : "As-tu des loisirs ? Sans que tu me dises ce que c'est si tu n'en as pas envie : fais-tu autre chose que la médecine ?"
Cette question suscite bien souvent une interrogation de leur part. En général, quand ils sont en stage quelque part, les étudiants ont juste envie de bien répondre à toutes les questions.
"Tu es content d'être en stage" "Oui, bien sûr !" (Même si ce n'est pas forcément toujours le cas)
"La journée commence tôt et finit tard, ça ne te pose pas de problème ?" "Non" (Même s'ils veulent des journées moins chargées)
Bref, à cette question, je sens parfois mes étudiants un peu déroutés. Ils aimeraient pouvoir répondre ce qu'ils croient que j'aimerais entendre : je me lève avec la médecine générale, je me couche avec la médecine générale, je rêve médecine générale, je ne vis que pour la médecine générale.
Ils se trompent. J'ai juste envie d'entendre tout autre chose.
Oh attention, je ne vais pas dire que j'ai envie d'entendre l'exact opposé. J'espère que les internes de médecine générale en stage chez moi veulent faire médecine générale comme métier. Sinon, les pauvres, 6 mois risquent d'être un peu longs.
Non j'ai juste envie d'entendre "Oui, j'ai des loisirs". Que ce soit du sport, de la musique, de l'art, des soirées entres amis, peu m'importe. Cela ne me regarde d'ailleurs pas.
Et d'ailleurs, si un soir, mon interne me demande si exceptionnellement il peut partir un peu plus tôt car il a quelque chose de prévu qui fait partie de la catégorie loisirs, je ne refuse jamais.
Parce que je reste persuadé qu'on n'est jamais meilleur avec les autres que lorsqu'on est bien avec soi-même.
J'appelle ça le trépied du bonheur. D'accord, c'est une appellation qui sent un peu la guimauve et l'eau de rose, mais je n'ai pour le moment pas trouvé meilleure expression.
Considérons que nous reposons tous sur 3 pieds. Comme le trépied d'un appareil photo par exemple. Il a trois pieds pour être parfaitement stable. Enlevez-lui en un, il peut encore tenir, mais au moindre coup de vent, à la moindre bousculade, il risque de tomber.
Le premier pied de mon "trépied du bonheur" est celui des relations sociales. Entendez par là, la famille, les amis, les connaissances. Tout ce qui peut nous mettre au contact d'êtres plus ou moins chers. Certains ne mettront que leur famille sur ce pied là. D'autres uniquement leurs amis. Peu importe. Si les relations sociales existent, c'est un pied porteur.
Le deuxième pied est celui de la profession. J'y mets le métier, bien entendu. Mais tout ce qui en découle aussi. Pour ma part, il y a ma profession de médecin généraliste qui me passionne, mais il y a aussi son enseignement.
Le troisième et dernier pied est celui des loisirs. J'y place volontiers en ce qui me concerne, le sport et la musique.
Le tout est de répartir le poids de notre vie sur ces trois pieds.
Tout reporter sur le pied social expose au risque de perdre complètement l'équilibre quand l'entourage n'est pas disponible.
Tout reporter sur le pied professionnel expose à un risque bien connu dans ma profession : le burn out. Se lancer à corps perdu dans son métier en oubliant tout le reste... et le jour où la profession n'apporte plus la satisfaction désirée, on perd l'équilibre.
Tout reporter sur le pied loisirs, cela pourrait paraître tentant. Mais s'ils ne sont là pour faire oublier que les deux autres pieds sont manquants, l'équilibre sera précaire et vite perdu.
Non, l'équilibre viable c'est celui qui repose sur ces trois pieds. Pas un de moins.
Et pour arriver à ce point d'équilibre, il faut parvenir à répartir sa vie sur eux. Pas forcément par tiers strictement identiques. Il y aura peut être un peu plus de poids sur le pied social... ou l'un des deux autres.
Mais il y aura toujours trois pieds.
J'ai choisi ma répartition. Le pied professionnel est important, bien sûr. Le métier que j'ai choisi me l'impose. Mais je veille aux deux autres pieds, qui sont fondamentaux.
Alors, vous pourrez bien essayer, mais je ne m'excuserai pas si un jour je termine une journée plus tôt pour allez voir un spectacle avec ma femme.
Je ne m'excuserai pas plus de ne pas être tous les samedis matins en consultation. Nous avons établi un roulement avec mes associés. Il y a toujours quelqu'un présent. Mais ce quelqu'un n'est pas toujours moi.
Je m'excuserai encore moins d'être absent le jeudi après-midi. Seul jour où je peux aller chercher mes enfants à l'école, les aider à faire leurs devoirs et être à la maison quand ma femme rentrera du travail.
N'essayez pas non plus, je ne regrette absolument pas de faire du squash, ou de diriger une chorale, même si le temps que j'y consacre est autant de temps en moins pour le reste.
Et aucune phrase du genre "ah ! vous n'êtes pas là après 21h ? Et bien on peut mourir alors !" ne me fera culpabiliser.
J'adore mon métier. Mais ce n'est qu'un tiers de ce qui fait que je suis moi-même.
"Connais toi toi-même, et tu connaitras les dieux et l'univers" (Socrate)
Je ne sais pas si je connaitrai les dieux et l'univers. Mais j'ai décidé d'être heureux en m'appuyant sur ce trépied.
Parce que c'est mon trépied du bonheur.
Parce que c'est ça qui me fait tenir en équilibre.
Parce que c'est un équilibre instable.
Et que je n'ai qu'une vie.
Très beau billet !
RépondreSupprimerPeut-être que cette histoire te dira quelque chose alors :
"Un pot de mayonnaise et de café.
Quand il te semble qu'il y a « trop » de choses dans ta vie, quand 24 heures ne te semblent pas suffisantes… Rappelle-toi du pot de mayonnaise et du café !
Il était une fois, un professeur de philosophie qui, devant sa classe, prit un grand pot de mayonnaise vide et sans dire un mot, commença à le remplir avec des balles de golf.
Ensuite, il demanda à ses élèves si le pot était plein. Les étudiants étaient d'accord pour dire que OUI.
Puis le professeur prit une boîte pleine de billes et la versa dans le pot de mayonnaise. Les billes comblèrent les espaces vides entre les balles de golf. Le prof redemanda aux étudiants si le pot était plein. Ils dirent à nouveau OUI.
Après, le professeur pris un sachet rempli de sable et le versa dans le pot de mayonnaise. Bien sûr, le sable remplit tous les espaces vides et le prof demanda à nouveau si le pot était plein.. Les étudiants répondirent unanimement OUI.
Tout de suite après le prof ajouta deux tasses de café dans le contenu du pot de mayonnaise et effectivement le café combla les espaces entre les grains de sable. Les étudiants se sont alors mis à rire…
Quand ils eurent fini, le prof dit :« Je veux que vous réalisiez que le pot de mayonnaise représente la vie.
Les balles de golf sont les choses importantes comme la famille, les enfants, la santé, tout ce qui passionne. Nos vies seraient quand même pleines si on perdait tout le reste et qu'il ne nous restait qu'elles.
Les billes sont les autres choses qui comptent comme le travail, la maison, la voiture, etc...
Le sable représente tout le reste, les petites choses de la vie.
Si on avait versé le sable en premier, il n'y aurait eu de place pour rien d'autre, ni les billes ni les balles de golf. C'est la même chose dans la vie. Si on dépense toute notre énergie et tout notre temps pour les petites choses, nous n'aurons jamais de place pour les choses vraiment importantes. Faites attention aux choses qui sont cruciales pour votre bonheur. Jouer avec ses enfants, prendre le temps d'aller chez le médecin, dîner avec son conjoint, faire du sport ou pratiquer ses loisirs favoris. Il restera toujours du temps pour faire le ménage, réparer le robinet de la cuisine… Occupez-vous des balles de golf en premier, des choses qui importent vraiment. Etablissez des priorités, le reste n'est que du sable.. » Un des étudiants leva alors la main et demanda ce que représente le café. Le professeur sourit et dit :« C'est bien que tu demandes. C'était juste pour vous démontrer que même si vos vies peuvent paraître bien remplies, il y aura toujours de la place pour une tasse de café avec un ami. »"
Pour moi la vie c'est un peu comme un recette de cuisine. Il y a les ingrédients de base indispensables et à côté un mélange subtil de sucré, d'amer et d'épices. à la fin il y a la cerise sur la gâteau, et là on est proche de la perfection. Ce qui est terrible c'est lorsqu'il manque un ingrédient de base et qu'on a beau se donner tous les moyens pour l'avoir, non c'est sans résultats. Le problème c'est que sans cet ingrédient de base il est inutile et impossible de rajouter autre chose.On est bloqué.
RépondreSupprimer