dimanche 26 janvier 2014

Quand on est con...

"Le temps ne fait rien à l'affaire. Quand on est con, on est con ! Qu'on ait 20 ans, qu'on soit grand père. Quand on est con, on est con !" (Quand on est con, Georges Brassens)

On le devient ou on l'est d'emblée ?
Il paraît qu'on est toujours le con de quelqu'un. Je veux bien le croire. Même si je trouve ça un peu con, justement.
J'espère ne pas être votre con, vous qui lisez ces lignes. En même temps, être con, c'est exister. C'est mieux que l'indifférence, non ?

Pourtant... Pas mal de messages circulent ça et là en ce moment, les anti "mariage pour tous", les anti IVG, les anti     (inscrivez ici ce que vous voulez)    ... qui stigmatisent une partie de la population et tentent le clivage des uns contre les autres.

"On danse, les uns contre les autres. On court, les uns après les autres. On se déteste, on se déchire, on se détruit, on se désire. Mais au bout du compte on se rend compte qu'on est toujours tout seul au monde" (Les uns contre les autres, Starmania)

Au final, la fameuse fraternité inscrite sur nos bâtiments publics, la tolérance qui devrait être la nôtre partout et en tout temps pour accepter l'autre dans sa différence... elles sont où ?
Sommes-nous condamnés à être de grands égoïstes vivant en société ?
Nos dirigeants politiques entretiennent-ils parfois cet égoïsme à des fins purement politiciennes ?

"L'essentiel à nous apprendre, c'est l'amour des livres qui fait qu'tu peux voyager d'ta chambre autour de l'humanité, c'est l'amour de ton prochain, même si c'est un beau salaud. La haine ça n'apporte rien, pis elle viendra bien assez tôt" (C'est quand qu'on va où ? , Renaud)

Oui, bon, on va encore me taxer de bisounourserie, mais franchement, si on y mettait juste un peu du nôtre, la vie serait tellement plus facile.
Suffirait juste de le vouloir. Un peu.
Parce que les enfants, eux, sont souvent plus tolérants que nous ne le sommes. Alors, on devient quand intolérant ?
Il y a un jour précis ? C'est comme les dates sur les yaourts, tu deviens non recommandable du jour au lendemain ? Ou, toujours comme les yaourts, même si tu dépasses un peu la date, on peut encore te côtoyer sans risque ?

"Nous avons été les bourreaux de Luther King, d’Atahualpa, Copernic et Galileo. Nous sommes les fils d’Attila. Pourquoi l’homme est-il donc un loup ? Cinq siècles et plus de barbarie... En aurons-nous un jour assez du sang des larmes et des cris ?" (Nous sommes ce que nous sommes, Dracula (avec Bruno Pelletier))

Quand devenons-nous vraiment nous-mêmes ?
Parce qu'à bien y réfléchir, je peux me souvenir du jour où j'ai décidé d'être médecin. Avant même de m'inscrire à l'université. J'avais décidé que je ferais ça comme métier. J'ai travaillé, j'ai eu mon concours, pas du premier coup, mais j'ai continué à travailler... Et j'ai passé toutes les autres années.
Mais quand suis-je devenu médecin ?

Quand j'ai vu mon premier patient ?
Quand j'ai pris en charge seul mon premier patient ?
Quand j'ai vu mon premier décès ?
Quand je me suis senti un peu responsable de mon premier ?
Quand je me suis installé ?
Quand j'ai eu un an d'installation ? Deux ?

Je suis l'heureux père de trois zèbres qui grandissent beaucoup trop vite à mon goût...
Mais je suis devenu père quand ?
Quand nous avons décidé d'avoir notre premier enfant ?
Quand nous venions tout juste de le faire ?
Quand la première zébrette est née ?
Au bout d'un mois ? Deux ?

Je pensais être politiquement de droite, parce que je crois viscéralement à la valeur du travail et qu'on n'a rien sans rien dans la vie. Travailler dur, peu importe le métier, mais être fier du travail accompli, comme autant de pièces d'un édifice que serait notre société. Enlevez une pièce, et l'édifice s'effondre.
Et je me rends compte à écouter les ténors de droite que je ne partage aucune autre idéologie.
Je suis donc devenu plus de gauche ? Mais quand ?
Quand j'ai été confronté à la détresse sociale de certains patients ?
Quand j'ai rejoint Twitter et que j'y ai lu les blogs humanistes et tolérants de beaucoup ?

Quand j'ai cessé de me regarder le nombril ?
Quand j'ai commencé à discuter avec un représentant politique ? Deux ?

J'essaye parfois d'arrondir les angles entre certains, dans la vraie vie ou sur les réseaux sociaux. De prôner un "aimez-vous les uns les autres" que mon enfance m'a appris.
Parfois ça marche. Parfois j'ai l'impression de faire pire que mieux.
Quand arrêterai-je ?
Quand ça ne marchera plus du tout ?
Quand on m'aura dit que je suis un vieux con à toujours vouloir arrondir les angles ?
Quand je me serai emporté en râlant devant l'immobilisme de certaines situations ?
Quand j'aurai "perdu" un ami ? Deux ?

"It's as if I'm scared. It's as if I'm terrified. It's as if I'm scared. It's as if I'm playing with fire. Scared. It's as if I'm terrified. Are you scared? Are we playing with fire?" (Relax, Mika)
(C'est comme si j'avais peur. Comme si j'étais terrifié. Comme si j'avais peur. Comme si je jouais avec le feu. Peur. Comme si j'étais terrifié. As-tu peur ? Jouons-nous avec le feu ?)

Quand on prend une décision, comment sait-on qu'on prend la bonne ?
Quand on décide de choses qui paraissent insignifiantes et ont d'immenses répercussions ensuite, le sait-on ?
Si on ne le sait pas tout de suite, on le sait quand ? Quand il est trop tard ? Quand on en récolte les fruits ? Les fruits mûrs ? Les fruits pourris ?
Parce que l'enfer est pavé de bonnes intentions, que le pouvoir pervertit en général ?
Comment être sûr de soi sans être aveuglé ?
Quand on se trompe une fois ? Deux ?


Faut vraiment que j'arrête de me poser autant de questions..

Quand on se pose beaucoup (trop) de questions, on passe pour un con ?

6 commentaires:

  1. Les cons ne se posent pas de question , ils osent tout c'est même à ça ....etc

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  2. Un texte très touchant, qui fait écho à mon couple, ou à notre incapacité d'avoir un enfant naturellement ; quand est-ce que je serai père, quand serons-nous des parents ?
    Ça fait trois ans que je suis père, même sans enfant. Cet enfant que j'attends depuis 3 ans, je suis déjà son père.
    ...
    Pour les autres questions, je n'ai aucune réponse. Il y a des jours où je sens en moi l'essence du soignant, d'autre non.
    Il y a des jours où je me sens l'âme profondément Marxiste ou Trotskiste, et d'autre simplement socialiste.
    Tout est question de curseur sur ce continuum idéologique. Ces étiquettes qui permettent de figer un quantum de pensées en identités politiques.
    ...
    Finalement ce qui compte vraiment c'est la question que l'on se pose, celle qui nous fait cheminer et qui nous fait arpenter des sentiers inconnus et qui nous fait vivre. La réponse, on s'en fout.
    Si être con, c'est de ne pas être inquiet de se poser des questions sans réponse, alors tu peux être fier d'être con.

    Amicalement

    B.

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  3. Droite, gauche, médecin ou interne, jeune ou vieux...
    Étiquettes qui nous permettent de créer l'illusion d'un monde connu, sous contrôle.
    Mais ne sommes nous pas définis et jugés sur nos actes, par ce qui nous meut ?

    La peur est le chemin vers le côté obscur : la peur mène à la colère, la colère mène à la haine, la haine… mène à la souffrance."

    Toute ces haines ces colères ne donneront rien de bien, fermons les yeux, ouvrons nos coeurs, et apprivoisont nous !

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  4. Bravo.
    Un hymne à la bisounoursie ambiante.
    Un hymne de gauche pas partial pour un sou.
    Je rappelle ici que le totalitarisme nazi et soviétique a tué plus de monde au vingtième siècle que...
    Je ne défends personne mais je n'ai pas la mémoire courte, je me rappelle les nouveaux croisés de la liberté qui acceptaient les totalitarismes avec enthousiasme.
    Je me rappelle ces anciens ennemis de la liberté qui se sont convertis sans se poser de questions et qui en donnent maintenant.
    J'ai croisé ce matin dans Versailles les tenants de la manif pour tous et je les ai vus comme des animaux sauvages très policés. Ils ne savent pas ce qu'ils font.
    Mais je n'ai pas moins de réticences à l'égard des partisans de la tolérance complète.
    L'anthropologie nous enseigne, enfin, ce que j'en ai compris, que les tabous étaient un des fondements du développement des sociétés et des individus. Il est nécessaire d'avoir des tabous. Il est nécessaire de refuser.
    Les manifs pour tous ont des tabous qui ne sont pas les miens et n'aiment pas les "différents".
    J'ai des valeurs qui ne sont ni chrétiennes (s'il est possible, en ayant été élevé en France, de s'en détacher), ni religieuses (en passant ma tolérance à l'égard des religions est très entamée : je me revndique comme christianophobe, islamophobe, judaïcophobe, bouddhistophobe, ad libitum), ni marxistes, ni multiculturalistes. Mon cerveau n'est pas un supermarché où il est possible d'acheter des théories qui me conviennent et qui conviennent au sur moi à la mode. Suis-je un khon ?
    Les khons sont quand même ceux qui ont ébranlé le monde.
    Einstein fut considéré comme khon par le système scolaire, par le milieu de la physique. Pasteur, qui tricha pour imposer la vaccination anti rabique, fut rejeté comme khon par les médecins dont il n'était pas. Semmelweis itou. Proust fut traité de khon par Gallimard avant de publier à compte d'auteur.
    Je ne parle pas des mêmes khons ?
    Et ne crois pas que je me compare à eux.
    Et je n suis pas d'accord avec les Femens de Caroline Fourest pour des raisons différentes de celles des intégristes catholiques.
    Tu as raison. Tu avais raison d'écrire que nous sommes toujours les khons des autres.

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  5. Moi, je trouve bien plus intéressants les khons qui apprennent que les khons qui savent.
    Continue de chercher cher Matthieu :)

    Sophie

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  6. Texte très touchant, allez courage à tous !

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