mercredi 22 mai 2013

Let the sunshine in

"Au nom de qui fait-on le choix de l'innocence ? Au nom de quelle liberté ? De quelle transparence ?" (Combien de murs, Patrick Bruel)

Enfin, nous y voilà. Le fameux sunshine act à la française qui permettra de rendre plus transparentes les relations entre les soignants et l'industrie pharmaceutique.

Bon, je l'espère en tout cas.
Car comme toujours il y aura sûrement des contournements.
Mais l'intention première est, à mon avis, particulièrement louable : tout le monde pourra désormais connaître à quelle hauteur l'industrie pharmaceutique finance quel professionnel de santé déjà formé ou en devenir, quel organe de presse ou encore quelle association.

En cela il s'agit d'un énorme progrès.
Certains de mes confrères, de bonne foi, sont dans le déni d'influence le plus complet, niant le fait qu'un laboratoire qui l'invite au restaurant en espère une contre-partie.
Il est vrai que tout entreprise privée est prête à dépenser des enveloppes budgétaires considérables par pure philanthropie, sans aucun espoir de retour sur investissement.

"Mais dans le respect de leur consensus, l'éventuel chantage n'était pas permis. L'entente voulait qu'ce soit jamais plus qu'un truc de passage voué à l'oubli" (Un truc de passage, Lynda Lemay)

Oui une petite invitation, un petit financement et après tout le monde rentre chez soi et oublie tout.
Jamais un visiteur médical ne dira "vous penserez à moi" ou "si vous pouvez me faire une boîte ou deux de plus, ce serait sympa". Ces phrases, je les ai entendues, dans une vie antérieure. A l'époque où je recevais encore la visite médicale, comme je l'avais expliqué ici.

Sauf que maintenant, tout le monde pourra aller consulter qui a bénéficié de quoi et par qui.
Alors, certains y verront une espèce de flicage. Un Big Brother des relations avec BigPharma.
J'y vois plutôt, comme je suis de nature optimiste, un possible cercle vertueux de la santé en France. Et dans ce cercle les patients auront un rôle à jouer.
Ils pourront demander à leur médecin si le médicament qu'on leur prescrit a un lien direct avec le financement reçu par le laboratoire qui commercialise ce même médicament.
Ou plus clairement : avez-vous un conflit d'intérêt, docteur ?

Du coup je me mets à rêver que mes confrères, pour prouver à leurs patients que leur démarche de soin et leur prise en charge est basée sur des connaissances adaptées et reconnues par la science, chercheront à être complètement indépendants de BigPharma. Pour dire au patient : ce que je vous prescris n'est pas influencé par quoi que ce soit de mercantile, mais bien par des données scientifiques validées.

"Et je m'envole (je m'envole), je voudrais crier ma liberté. Je veux comprendre pourquoi c'est si beau quand je suis tout là-haut" (Je m'envole, Les Charts)

Je rêve aussi d'un jour où, à l'image de mes collègues qui arborent fièrement leur qualité de lecteur émérite de la Revue (indépendante) Prescrire, tous mes collègues seront fier d'arborer un beau zéro euro à côté de leur patronyme sur le site qui rendra public les conflits d'intérêt.
En tout cas, à côté de mon nom, je continuerai de faire chaque jour attention à ce que ce zéro euro soit le prix de ma liberté.

"Let the sunshine, let the sunshine in" (Let the sunshine in, Hair)

Oui, que vienne le "Sunshine act" à la française.
C'est l'heure.

1 commentaire:

  1. Cela m'a d'abord choquée, puis toujours surprise, les repas ou petit dej' de labo à l'hôpital... Comme un racolage un peu malsain où le croissant de la meilleure patisserie de la ville a un peu goût du traitement qui se cache derrière...

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